Casses contre la vie chère à Bobo/ Réveil des vieux démons
Casses contre la vie chère
Tout semblait indiquer que ce mercredi 20 février 2008 ne serait pas comme les autres jours : les tracts contre le gouvernement de Tertius Zongo au contenu amer qui ont circulé sous le manteau durant toute la semaine écoulée et qui invitaient la population à sortir massivement pour manifester son "ras-le-bol" contre la vie chère étaient déjà suffisants pour se faire une idée de ce que serait cette journée.
Surtout en ces temps de récession économique, où les gens à Bobo-Dioulasso restent unanimes sur la difficulté, de plus en plus grande, des conditions de vie au Faso. Une triste réalité marquée par le renchérissement des prix des produits de première nécessité et qui compromet dangereusement le "nansogo" dans les ménages.
S’ils étaient nombreux à adhérer à une telle initiative pour se faire entendre par le gouvernement pour une prise en compte effective de leurs préoccupations, il reste néanmoins entendu que beaucoup ne s’attendaient pas à une telle tournure des événements avec ces nombreux dégâts qui ont été occasionnés par des manifestants.
Hier, Bobo-Dioulasso présentait, par endroits, une image des plus apocalyptiques et qui nous rappelle étrangement la présidentielle de 1991, lorsque la ville avait basculé dans une violence indescriptible et qui avait fait de nombreuses victimes au nombre desquelles le richissime Barro Dianguinaba, dont le magasin avait été littéralement pillé.
Hier encore, on a vécu la même situation et cela, malgré le déploiement rapide des forces de l’ordre en certains points, stratégiques, de la ville. Toute cette matinée en effet, les dispositions sécuritaires étaient déjà prises avec les éléments de la CRS et de la gendarmerie dans la rue, armés jusqu’aux dents et qui avaient entamé leur ronde dans le centre-ville, où la plupart des boutiques étaient restées fermées. Mais tout cela était bien loin d’intimider des vandales, qui ne tarderont pas à entrer en action par des jets de projectiles.
Au fur et à mesure que le temps passait, le nombre de manifestants ne faisait que croître et le mouvement finira par s’étendre à toute la ville. L’atmosphère déjà suffocante avec les gaz lacrymogènes et les épaisses colonnes de fumée qui se dégageaient des pneus en flammes. L’armée sera appelée à la rescousse vu que les forces de l’ordre étaient loin de maîtriser la situation : ainsi, la direction régionale de la SONABEL, qui a essuyé des projectiles, sera placée sous la protection des berets rouges, dont la présence a été également signalée dans des points stratégiques comme la SOFITEX ou encore la zone industrielle.
Dans leur mouvement, les manifestants n’épargnaient rien sur leur passage : des feux tricolores détruits, des panneaux publicitaires et de signalisation arrachés, des vitres brisées, des véhicules endommagés, des boutiques pillées, des stations d’essence investies, des kiosques démolis, etc.
A l’heure où nous tracions ces lignes, nous n’avions aucune information précise quant à une éventuelle perte en vie humaine, même s’il reste entendu que des blessés, dont certains dans un état grave, ont été évacués vers l’hôpital Sourou-Sanou.
Reste maintenant à connaître les initiateurs de ce mouvement, qui aura fait plus de mal que de bien. Et le plus révoltant dans cette affaire est que ses vrais instigateurs, c’est-à-dire les auteurs des tracts distribués dans la zone commerciale, ont refusé de s’afficher et ce, malgré, dans le fond, la justesse de leur lutte. Pendant que nous y sommes, pourquoi n’ont-ils pas voulu suivre la voie légale pour se faire entendre ?
Ce mouvement, qui a certes paralysé les activités hier à Bobo-Dioulasso, aurait eu de l’importance si l’essentiel des manifestants n’étaient que de simples délinquants ou des désœuvrés sociaux qui ne rêvaient pas de mieux pour se défouler dans les rues de la ville et étaler sur la place publique leur incivisme. Et tant pis pour le contribuable burkinabè, qui paiera pour les dégâts occasionnés au cours de cette manifestation.
En attendant de connaître les cerveaux de ce mouvement et avec le calme qui semblait revenir peu à peu hier en fin de journée, l’heure est au bilan chez des commerçants, des gérants de kiosques ou de boutiques qui ont tout perdu au cours de cette journée. Toujours est-il que des enquêtes sont en cours et des arrestations ont même été déjà opérées par les forces de l’ordre.
Affaire donc à suivre.
Jonas Appolinaire Kaboré
L’Observateur
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