Culture
Frédéric Titinga PACERE éminent homme de culture, de droit, et des lettres « J’ai l’impression, en parcourant l’Afrique et mon pays, que nous n’avons pas trop foi en notre culture … »
Frédéric Titinga PACERE éminent homme de culture, de droit, et des lettres « J’ai l’impression, en parcourant l’Afrique et mon pays, que nous n’avons pas trop foi en notre culture … »
Le lièvre, on peut ne pas l’aimer, même lui dénier de grandes oreilles ; mais, on ne peut lui refuser sa qualité de fin coureur. C'est-ce que dit le dicton et il nous fait penser à cet homme qui, pour ne pas avoir sa langue dans la poche et qui se trouve sur plusieurs fronts de batailles des hommes, n'est pas des moins polémiques autant il est polémiste acerbe. Me Frédéric Titinga PACERE, c'est de lui qu'il s'agit, est un homme à plusieurs casquettes, un homme orchestre diront certains. Auteur de plusieurs travaux de réflexion en droit et en lettre, protecteur et diffuseur de valeurs culturelles de son terroir et de l'Afrique, l'homme a incontestablement porté haut, même très haut, le nom de notre pays. A preuve, en l’espace de 8 jours, dans le même mois de l’année 2009, il a été admis dans deux prestigieuses académies en France. L’occasion faisant le larron, profitant de l’interview qu’il nous a accordée, relativement à la destruction du fétiche de Kalsaka, nous nous sommes fait fort de l'amener à nous entretenir sur le sens et la portée de ces récentes distinctions ainsi que sur son combat pour la défense et la promotion de la culture burkinabè et africaine. Lisez plutôt !.
Maître,
vous avez été admis, courant octobre 2009, à deux académies en France.
Peut-on savoir de quelles académies il s'agit, et le sens exact de ces
élévations de votre personnalité en France ?
Maître Frédéric Titinga PACERE (Me F.P.T) : Je
l'avoue, ce fut une surprise pour moi. En effet, le 13 octobre 2009,
j'ai reçu un message m'informant en confidentiel avant qu'une lettre
officielle me parvienne, que la veille, dans l'après-midi soit le 12
octobre 2009, le bureau et l'organe délibérant de l'Académie des arts,
des lettres et des sciences de Languedoc m'a admis en son sein en
qualité de membre Honoris Causa conformément à l'article 6-D portant
composition de l’académie. Au terme de cette disposition, le membre
honoris causa est entendu comme une personnalité française ou étrangère
à la France dont la présence honore l’académie. Cette personnalité est
Ambassadeur, à travers le monde, de l’académie.
Huit jours plus
tard, soit le 21 octobre 2009, j'étais également informé que le bureau
et l’organe délibérant de l'illustre Académie des Sciences d'outre-mer,
connue de l'Afrique parce que quelques rares éminents membres y ont
déjà siégé, à la différence de la précédente académie qui n'avait pas
encore connu d'Africains en son sein, s'était réuni la veille, soit le
20 octobre 2009 et à l'humanité, comme la précédente académie, m'a
admis comme membre.
L'Académie de Languedoc m'a déjà informé que je dois recevoir les
insignes de membre honoris causa et être installé dans les salons de
l'illustre palais de Luxembourg de Paris, le mercredi 2 décembre 2009.
Pour l'Académie des Sciences d'outre-mer, la décision venant d'être
prise, les cérémonies d'investiture et de remise d'insignes n'ont pas
encore fait l'objet de programmation de date.
Dans
un intervalle de 8 jours, vous vous retrouvez ainsi dans deux académies
; cela honore au-delà de votre personne, notre pays le Burkina Faso. Si
pour l’Académie de Languedoc, vous êtes seul de l’Afrique pour
l’Académie des sciences d'outre-mer, êtes-vous également la seule
personnalité africaine avoir été nommée ?
Me F.T.P : Pour
ces académies de très haut rang, le nombre d'académiciens est en
général fixé depuis des décennies sinon des siècles. La conséquence de
cela est qu'il faut qu'un académicien meure pour qu'il soit pourvu à sa
charge.
Concernant l'Académie des sciences d'outre-mer,
l'information est récente. Je n'ai pas pu avoir d'autres précisions,
encore qu'en fait, dans mon intime joie, cette élévation de ma
personnalité me dépasse et me suffit. Je ne vois pas pourquoi je
chercherai d'autres précisions immédiates sous cet angle. Néanmoins,
j'ai entendu ces derniers jours, que le Prince HENRIK du Danemark a été
admis en même temps que moi dans cette académie.
Concernant
l'Académie des sciences d'outre-mer, puisque dans l'autre vous êtes
seul africain à ce jour, et nous attachant au volet culturel qui semble
le plus marquer votre personnalité, y a-t-il au moins d’autres artisans
défenseurs de la culture africaine également admis ?
Me F.T.P :
De ce que j'ai entendu dans ce domaine, il est à citer le poète
président, Léopold Sédar SENGOR admis en 1971 dans l'académie. Avant de
cumuler également avec son élévation à l'Académie française. Je peux
citer également, Amadou Matar MBOW du Sénégal. Il y a aussi,
Amadou-Hampaté-BA du Mali. On m'a cité également un de mes aînés, M.
Oumar BA de Mauritanie l'homme qui a traduit le Coran en français. Lui
et moi, avons en 1979, fait plus de 10 Etats des Etats unis (Indiana,
Texas, Californie Nord et Sud, Géorgie, en rendant visite à la famille
de Martin Luter KING,…) pour prononcer des conférences, exposer et
défendre la culture africaine.
Me dans quelle circonstance avez-vous connu cette distinction de membre honoris causa de l'Académie de Languedoc ?
Me F.T.P :
Pour compréhension, je suis obligé de partir de très loin. Pendant une
quinzaine d'années, j'ai eu à siéger (et continue de siéger d'ailleurs)
au jury du grand prix littéraire de l'Afrique noire, connu sous le nom
de concours africain, qui est le plus grand prix littéraire de
l'Afrique au Sud du Sahara. Le président, pendant plus d'une dizaine
d'années était le professeur émérite de la Sorbonne et de Paris
Descartes, le Pr Edmond JOUVE. Nous avons sympathisé. On nous appelait
les amis, et même les frères. Il m'a invité plusieurs fois dans sa
région de Quercy relevant du Languedoc (Sud-ouest de la France) et son
village, Peyrac, que j'ai plusieurs fois visité. Il m'a même montré et
fait connaître la ville mythique, Rocamadour, dont je serai citoyen
d'honneur.
Lui aussi a eu un amour très profond pour le Burkina
Faso (il est officier de l'Ordre national du Burkina Faso) et est venu
me rendre visite plusieurs fois à Manega. Au moment, d'aller à la
retraite, ses amis de l'université de la Sorbonne m'ont demandé de
faire un témoignage sur sa vie, telle que l'a perçue et l'aperçoit son
frère d'outre-mer que je suis. On souhaitait au maximum 6 pages, j'en
ai fait 126. Evidemment, les témoignages devant être rassemblés pour
confectionner un ouvrage, « Mélange offert au Pr Edmond JOUVE »,
mon travail dépassait la mesure souhaitée. Mais le comité
d'organisation de l'ouvrage a été impressionné par le travail qui
apparaît hors des normes et des canaux classiques de la littérature
française. En effet, j'ai parlé de lui, du Quercy, de sa famille, de
ses travaux, en utilisant le langage du tam-tam et des masques de mes
propres travaux que j'ai désignés par le concept de la Bendrologie. Ce
manuscrit qui a fasciné le comité d'organisation des « Mélanges… », a
fait l'objet de communication à des sphères intellectuelles de
recherche et de publication du Languedoc. Il a été ainsi se retrouver
dans le cercle de l'Académie des Arts, des Lettres et des Sciences qui
l'a étudié, analysé, soumis au jury littéraire de l'académie, qui l'a
plébiscité et lui a attribué le grand prix de poésie de l’année, grand
prix connu sous l'appellation de « Grand prix Goudouli de Poésie de l'académie des Arts des Lettres des Sciences de Languedoc ».
J'ai
été invité le 12 juin 2009 au palais du Luxembourg pour recevoir et le
prix, et les insignes de ce prix. La cérémonie avait été rehaussée par
la présence de notre ambassadeur, Luc Adolphe TIAO, à Paris, notre
consul honoraire à Nice, Arcadi de St Pierre, notre ministre de la
Jeunesse et de l'Emploi de passage à Paris, Michel KOUTABA, outre les
présidents de plusieurs académies et d'institutions au plus haut degré
de ce pays. J'ai prononcé après avoir reçu le prix et les insignes, un
discours que je pensais conforme à mon style et à ma nature, à mon cœur.
Les suites de ce discours me surprendront. Beaucoup d'académies et
institutions de France, surtout que la cérémonie s'est déroulée au
palais de Luxembourg qui suppose un grand rendez-vous d'auréoles, ont
demandé une copie du discours. De ce que j'apprendrais plus tard, les
académiciens auraient vu derrière ce discours, une personnalité
spéciale qui méritait approche et connaissance. C'est ainsi que j’ai
appris qu'on aurait fait des recherches sur mes travaux avec analyse de
ma personnalité à travers l'Afrique et le monde.
C'est suite à cela que j'ai brutalement moi-même appris ce 13 octobre
2009 que la veille, 12 octobre 2009, cette académie m'a introduit en
son sein avec qualité suprême de membre honoris causa.
J'avoue que j'étais un peu abasourdi avec un sentiment de vertige du
fait que je ne pensais pas un jour être membre d'une académie encore
moins d'une académie de France de cette envergure-là.
Cette académie de Languedoc, pouvez-vous nous donner quelques éléments sur son institution et ses objectifs ?
Me F.T.P :
Cette académie des Arts, des lettres du Langue d'Oc est une société
savante de France. Elle a été fondée pour établir un lien permanent
entre la capitale française (Paris) et les principales métropoles des
pays d'Oc. Ses objectifs, c'est de sauvegarder les traditions des
témoins de ces anciens parlers occitans et de favoriser l'essor de ces
pays dans tous les domaines, scientifique, littéraire, artistique,
économique, social, culturel.
De ces moyens d'actions figurent
l'attribution de prix et récompenses à des organismes et personnalités
qui perpétuent les traditions languedociennes et se révèlent les
meilleurs dans leurs activités.
De
ce que vous venez de dire, on se demande ce qu'une telle académie
spécialisée peut rechercher dans des travaux de Me PACERE. On ne voit
pas très bien en quoi vos travaux ont pu rencontrer l'intérêt d'une
telle académie. Que s'est-il donc passé, vous concernant, pour que vous
ayez une admission dans un cercle peut-être même fermé pour les
Français natifs ?
Me F.T.P : Le problème
est très complexe. Il faut, je le crois, remonter aux raisons de la
fondation de cette académie dont les objectifs comme signalés sont de
sauvegarder notamment d'anciens parlers.
Sans déjà entrer au fond
du problème et me référant à mon ouvrage qui m'a fait connaître par
cette académie, cet ouvrage est certes pour rendre hommage à une
personnalité de ce pays de Langue d'Oc, mais si on lit les domaines
décrits abordés, portent des titres tel que "Le Quercy et le paysage"
(deuxième chapitre de l'ouvrage) "Parcours à travers la nature"
(quatrième chapitre de l'ouvrage) "Les traditions" (cinquième chapitre
de l'ouvrage) "Le gouffre de PADIRAC" (6e ch.) "ROCCAMADOUR, Le
Sanctuaire, le sacré et le culte" (7e et 8e chapitre) "Le grand ordre
et l'Epée Durandal", « Des épopées du Quercy et de France (9e et 10e
ch.) "Les auteurs et écrivains du Quercy" (11e chapitre). Comme on le
constate, mon livre traduit, illustre, défend les valeurs culturelles,
les traditions languedociennes, la littérature, les épopées et les
légendes languedociennes.
Je suis donc entré dans ce livre en expert, en spécialiste selon eux du
pays d'Oc, ce qui a légitimé leur attrait d'une telle personnalité à
être membre et avocat connaisseur du pays d'Oc. Si maintenant on veut
entrer en profondeur des valeurs de recherche et quêtes de cette
académie, il faut savoir qu'elle s'est fondée pour, entre autres grands
objectifs, défendre la Langue d'Oc. Langue qui emportait depuis des
siècles des valeurs culturelles millénaires et que le Français depuis,
phagocyte ne ramène les utilisateurs et les conservateurs et qu'à
quelques milliers, quelques centaines, sinon à des individualités de
personnes.
Aussi cette académie lutte au plus profond d'elle-même pour la
préservation des langues, la préservation des cultures des langues en
voie de disparition. Il se fait que du côté de la compréhension, une
très grande partie de mes recherches et publications porte sur les
valeurs et civilisations contenues et incarnées dans les langues
africaines en particulier le moré du Burkina Faso. J'ai eu à m'exprimer
sur ce terrain en maintes occasions et dans mes travaux, que le langage
des anciens en particulier du mogho, que le langage des tam-tams et des
masques d'Afrique renferment et enseignent des valeurs pour la paix et
la gouvernance des peuples qui ne relèvent pas des langages courants.
Pierre GOUDOULI, dont il m'a été attribué le prix qui porte son nom, a
lutté pour que ces langues ne disparaissent pas, parce que vecteurs de
valeurs intemporelles. L'académie a fait un parallèle certainement
entre les luttes menées par cet homme né en 1580 et décédé le 10
septembre 1649, avocat de l'Occitan pour des langues porteuses de
valeurs et fortement agressées, livrées à la mort par des langues de
puissance, et mes travaux qu'on estime également passionné comme ceux
de Pierre GOUDOULI, ici pour que les langues africaines ne
disparaissent parce qu'elles emportent des valeurs qui ont droit à
l'éternité.
L'intérêt et l'inquiétude d'un Pierre GOUDOULI de France du 16e siècle
et d'un Me PACERE des temps modernes de l'Afrique et du Burkina Faso
sont légitimes et de gravités extrêmes du cœur même des luttes de
l'académie actuelle de Languedoc.
Je voudrais me faire comprendre. Comme je l'ai dit dans mon discours de
réception des insignes, selon l'UNESCO, de nos jours, une langue sur
près de 6300 que comptent la planète meurt en moyenne toutes les deux
semaines. 50 à 90 % des langues, et c'est un drame, pourraient
disparaître au cours de ce siècle. Une langue telle que l'Arakie au
Vanuatou dans le pacifique n'est plus parlée que par 8 personnes. Il y
a 67 groupes ethniques au Burkina Faso. 52% de la population représente
le groupe des mossé. Selon le Pr Gérard KIENDREBEOGO, directeur de
l'Institut des sciences de la société (INSS) de l'université de
Ouagadougou, 7 langues mooré des mossé risquent de disparaître d'ici un
siècle, au plus un siècle et demi. Que penser, dès lors, de l'avenir
d'ici un siècle et un siècle et demi des 66 autres groupes ethniques du
Burkina Faso. L'académie de Languedoc qui s'est donné pour objectif la
préservation des langues, parce que porteuse d'humanisme et de
l'humanité, a vu dans mes travaux et luttes, une passion de ne pas
laisser disparaître les langues et leurs cultures. Elle a vu en son
ancêtre Pierre GOUDOULI un avocat de la lutte du Languedoc, mais en
fait dans le principe, de la lutte universelle pour la sauvegarde des
langues, et a vu au-delà des terres et des mers, au-delà des
continents, des forêts et des sables mouvants, au delà même du temps,
en Me PACERE un succédané, une résurgence d'un Pierre GOUDOULI qu'il
faut reconnaître, et distinguer. J'ai dit précédemment que dans les
objectifs des statuts du prix de cette académie, ce prix récompense des
personnalités qui perpétuent les traditions languedociennes, mais j'ai
précisé aussi qu'il s'agit de récompenser des personnalités qui se
révèlent les meilleurs dans leurs activités. Ils ont donc récompensé Me
PACERE comme se révélant meilleur dans ses travaux de recherche et de
publication qui rejoignent les principes de défense sacrés de
l'académie à savoir la défense des cultures des mondes en péril,
particulièrement la culture des langues.
Comment Me PACERE s'est-il retrouvé membre d'une telle illustre académie des sciences d'outre-mer ?
Me F.T.P : Là
aussi, je l'avoue, c'est très complexe, et je suis obligé de vous
parler de l'histoire de ma plume car nécessaire à la compréhension ;
même si, j'en conviens, ces derniers moments j’ai été absent de
l'histoire qui s'est construite sur deux décennies sans recherche
directe de cette académie.
Je crois que je dois beaucoup au
Professeur émérite des universités de France, Robert CORNEVIN, à mes
débuts, président de l'Association des écrivains de langue française,
secrétaire perpétuel de l'Académie d'outre-mer, directeur de la
documentation française et ai devant sa mémoire une pensée parce qu'il
fut l'un des plus grands artisans de ma plume et de ma personnalité.
En 1975, je pensais sortir coup sur coup 5 ouvrages dont 3 de poésie qui sont les premières publications de ma vie :
- La famille voltaïque en crise (sociologie)
- Problématique de l'aide aux pays sous-développés (économie)
- Refrain sous le Sahel (Poésie)
- Ça tire sous le Sahel (Poésie)
- Quand s'envolent les grues couronnées (Poésie)
Mes
trois dernières publications, toutes de poésie, furent soumises aux
grands prix littéraires de l'Afrique Noire (ADELF) comme sus précisés
appelés Concourt Africain, le plus grand prix littéraire au Sud du
Sahara. Le président de l'ADELF était le Pr Robert CORNEVIN que je ne
connaissais que de nom, et parce que qu'il avait beaucoup écrit sur
l'Afrique noire. Je n'eus pas le prix, mais en fait, je ne m'attendais
pas à quelque chose, n'ayant jamais pensé que mes œuvres pouvaient
avoir une valeur. En 1977, je fus surpris, suite à un rendez-vous
sollicité, de recevoir à mon bureau, une personnalité qui se présenta.
C'était le Pr Robert CORNEVIN.
Il me dit qu'arrivé à Ouagadougou
dans le cadre de coopération entre la France, la Côte d'Ivoire et la
Haute-Volta aujourd'hui Burkina Faso, pour la réalisation d'un film sur
l'histoire du chemin de fer Abidjan-Niger, il s'était souvenu de ma
postulation et de mes ouvrages soumis en 1976 aux grands prix. Il
m’apprit, ce qui me renversa comme une hydre, qu'il y avait des
dizaines d'ouvrages soumis, mais que le jury était parvenu après
plusieurs échanges et tours de table à se retrouver devant l'œuvre d'un
certain écrivain et mon œuvre constituée par 3 recueils de poèmes. Près
de 5 tours de tables n'avaient pu départager ces postulants. Et que, il
me le confesse, il en recourt, « en
tant que président, à ma décision pour trancher qui n'était pas
littéraire et ne portait pas sur les œuvres en compétition ». Il a
réfléchi avec le jury sur beaucoup d'autres critères, mais, il s'est
aperçu en revoyant les fiches, que l'auteur que j'étais, était encore
très jeune, qu'il a publié 5 ouvrages en une seule année. Il a dit : « un
enfant de cet âge qui publie 5 ouvrages dont 3 recueils de poèmes de
cette facture la même année produira certainement beaucoup d'ouvrages
dans la vie et de qualité. Certaines raisons ne permettaient pas de
penser que l'autre candidat pourrait encore écrire. » Il me dit
donc que s'il s'est permis de m'ouvrir cette confidence, c'est parce
qu'il pense que le fait de n'avoir pas eu le prix, je ne me décourage
et n'écrive plus. Je lui ai dit qu'en toute honnêteté, je ne pensais
pas à ce prix parce que je n'avais jamais imaginé que mes écrits
avaient de la valeur à mériter un tel prix. J'ai voulu seulement
risquer parce que incité par mon éditeur, Pierre Jean OSWALD de Paris.
Seulement et je le lui ai dit, que lui, auréolé de tant de compétences
et de récompenses universelles, vienne jusque dans mon bureau pour me
dire que ma plume poétique vaut de la peine, cela n'est pas seulement
qu'un honneur, mais une dictée de reprendre vite ma plume et de
réécrire.
Ainsi, en 1979, j'ai publié mon ouvrage de sociologie
"Ainsi, on a assassiné tous les mossé". En 1982, j'ai publié en même
temps deux ouvrages de poésie :
- Poème pour l'Angola
- La poésie des griots
Ces
deux livres ont reçu justement le grand prix littéraire de l'Afrique
noire que je convoitais déjà. Pour me témoigner de son admiration et de
ses encouragements à continuer de produire et à défendre la culture, il
m'amena visiter la documentation française qu'il dirigeait. Le soir il
m'emmena dans un restaurant sur le bord de la Seine. La table qui nous
reçut m'apparaissait singulière et plus singulière encore était la
position de la chaise sur laquelle il me demanda de m'asseoir. La
position de la table semblait isolée, mais des rubans dorés isolaient
encore la chaise qu'il me fit occuper. Au moment de me lever de la
chaise, j’osai lui demander quelle était la particularité de cette
table et de la chaise sur laquelle je me suis assis. Il me répondit en
souriant parce qu’il sait que cela me troublerait, que c’est la chaise
sur laquelle venait s’asseoir Victor HUGO quand il venait dans ce
restaurant et qu’il n’est pas autorisé à l’occuper à moins de
circonstance exceptionnelle mais l'a fait pour m’honorer et surtout
m’encourager à écrire, à publier, à défendre la culture des peuples.
Ces dernières années (je suis à près de 50 livres dont 16 de poésie
sans compter les formes à caractère poétiques de langage du milieu),
plusieurs académiciens m’ont demandé s’il n’était pas opportun que je
frappe à la porte de cette institution à laquelle j’avais été déjà
présenté avec un bon accueil en 1983 ; il y a donc de cela 26 ans.
C’est ainsi que ma candidature a été soumise aux délibérants au plus
haut sommet de l’Académie et à l’unanimité cette candidature était
agréée et je devenais ainsi membre. Je leur rends à tous hommage pour
cette considération à l’endroit de ma modeste personne. Hommage à celui
que je peux appeler père pour moi, et guide dans la vie, de la plume
littéraire et dans la défense des cultures, le Pr. Robert CORNEVIN.
Gratitude également à M. le président de l’Académie des sciences
d’outre-mer, à tout le bureau, à tous les présidents de section, à tous
les membres de l’Académie. Je m’engage pour l’honneur de mon pays et
la dictée à moi de mes paires et de mes ancêtres à lutter pour la
défense des cultures de mon pays et de l’Afrique, des cultures de
France et des sciences d’outre-mer.
On a l’impression que vous êtes plus connu et plus apprécié en Afrique et de l’Afrique que dans votre pays. Est-ce vrai ?
Me F.T.P :
J’avoue ne pas penser souvent à la situation. Je vis surtout et
curieusement sur l’avenir, pour l’avenir qui construira le présent.
Sinon, pour ne pas fuir votre question, il y a un intérêt de
l’extérieur sur ma personnalité et mes travaux qui souvent me
bouleverse. Par exemple, pendant 8 ans, et de manière successive, un
sujet, chaque année, de CAPES de Côte d’Ivoire est tombé sur Me PACERE.
Il ne se passe pas de semaine sans que je ne reçoive, même à Arucha où
j’étais pendant des années, d’appels téléphoniques de tous les points
du globe pour interview, etc.
Il y a même des ouvrages consacrés
à Me PACERE, des dizaines de mémoires et thèses de recherches sur Me
PACERE ou des travaux de Me PACERE. C’est tout cela qui m’incite au
travail, surtout en matière de culture qui intéresse l’opinion pour une
meilleure connaissance de nos peuples.
Au pays, je crois surtout que l’intérêt est hautement manifesté sur mes
travaux par le milieu rural et les anciens de nos cultures. Je reçois
souvent, du moins quand j’étais plus fréquent au pays, des vieillards à
dos d’âne qui viennent échanger avec moi sur les éléments de
connaissance de la culture. Mais, objectivement, à y regarder de près,
les 80% des achats portants sur mes travaux sont faits à l’extérieur.
Nul
n’est prophète chez soi, dit-on. Peut-être vous concernant il peut y
avoir l’excuse que depuis une dizaine d’années, vous ne travaillez plus
au pays et que vous n’êtes pas disponible pour le pays. A preuve, que
devient l’émission qui semblait être très prisée dans l’opinion
publique «Temps passé temps présent » dans laquelle et par laquelle
vous parlez beaucoup de culture ?
Me F.T.P : Ma
vie n’est toujours pas connue du public et moi-même, on me reproche
d’être secret. Pour cette émission qui était très appréciée dans
l’opinion, si elle n’a plus cours, c’est vrai qu’on a entendu que c’est
pour des raisons de disponibilité et de calendrier de ma part, la vrai
raison est ailleurs, terrible et triste. Pratiquement, les émissions
que j’accordais dans ce domaine et à thèmes variés (l’hospitalité,
Dimdolomsom, le langage des tam-tams…) portaient pratiquement et pour
diffusion pour trois heures d’enregistrement. Pour les dernières
émissions, en attente avec la télévision et les populations de Manéga,
nous avons attendu le jour de l’enregistrement de 9h à 21h, avec des
participants et accompagnateurs souvent déplacés du Bazèga. L’équipe
d’enregistrement n’est pas venue. Cela fut reporté, et nous avons
attendu au jour indiqué, en vain. J’ai appris qu’une personnalité a
interdit la TNB d’enregistrer les émissions de culture avec Me PACERE
et d’en diffuser. Pour ce qui est de la diffusion, j’avais, avec cette
même équipe de la TNB, à la place Mogho Naaba Koom (Place de la gare
ferroviaire à Ouaga), enregistré une émission portant sur cent années
des travailleurs migrants du Burkina Faso. Cette émission repose sur un
travail qui m’a été demandé par l’UNESCO du fait de l’importance dans
l’histoire des migrations des travailleurs du Burkina Faso. L’UNESCO,
impressionné par ce travail, l’a édité aux éditions KHARTALA de Paris.
Il a été enregistré deux émissions. Ces deux émissions ont été
interdites, de diffusion par cette même personnalité. C’est pour cela
que depuis, non seulement cette émission est arrêtée, mais que je n’ai
plus rien fait au niveau culturel sur les antennes de notre télévision.
Vous avez dit nul n’est prophète dans son pays, vous avez raison. Je
regretterai seulement, même quand je ne serai plus là, que nos enfants
soient contraints d’aller ailleurs en Afrique et un peu partout dans le
monde pour rechercher des travaux, écrits, interview, sur des cultures
burkinabè pour lesquelles chaque Burkinabè interpellé avait le devoir
de livrer ses connaissances même discutables qui pourraient servir de
base à la réflexion et à la meilleure saisine de notre histoire.
Me
concernant, et les journalistes le savent, les enseignants et les
étudiants le savent, si tant est que je suis au pays, je suis toujours
disposé à répondre à toute attente, aux sollicitations, de jour comme
de nuit, de jours ouvrables ou les week-ends. Je ne sais pas en
particulier (j’ai 66 ans) si dans un an ou dans deux ans, j’aurais la
même force au maîtrise intellectuelle de mes pensées pour répondre de
manière propre de questionnement de l’opinion, aux connaissances du
peuple. Il faut toujours aller vite. La vie est éphémère. Après mes
émissions sur Dimdolomsom, j’avais ciblé des sujets portant sur des
chefs de terre (Teng-Soaba des Yionyionsé), des cultures profondes de
ces peuples antérieurs aux mossés. Des maîtres de la parole qui
devaient être avec moi, dans l’émission sont aujourd’hui morts. J’ai
voulu inviter à l’émission des patriarches détenteurs de connaissances
des plus rapprochées d’acteurs du monde de la résistance à partir de
Kouda où était le quartier général du Mogho Naaba Wobgo qui tentait en
1886 de délivrer Ouagadougou alors envahi par les colons VOULEY et
CHANOINE. Les enregistrements que j’avais envisagés n’ont pas pu se
faire, mais de retour ces derniers temps au pays, certains atteints par
l’âge ont disparus. Une illustration de la précarité des grands témoins
de l’histoire qui ne doit jamais nous échapper nous inciter à ne pas
traîner le pas ou jouer avec l’histoire de notre pays et sa
connaissance. (Long silence, puis soupir).
Me, que se passe-t-il ? Êtes-vous triste ou êtes vous devenu triste ?
Me F.T.P : Quand
je pense à la mort quelque peu programmée de nos cultures, souvent avec
notre propre complicité, il est certain que la tristesse ne peut pas
ne pas être au rendez-vous. Contrairement à ce que nous pensons, les
pays qui se sont développés et qui avaient une culture n’ont pas écarté
cette culture des mécanismes de leur développement. La Chine fait
parler beaucoup d’elle ces derniers temps et fera parler d’elle au
cours des années à venir. Le plus grand évènement sportif s’est déroulé
en Chine le 8 août 2008. Les chinois, eux, vénèrent le chiffre 8. A
preuve, les Jeux olympiques ont été ouverts le 8 août 2008 à 20 h 08.
C’est-à-dire la 8e année, le 8e mois de l’année, le 8e jour du mois, à
8h de la nuit, à 8 minutes. C’est-à-dire que la Chine a fait déplacer
les plus grands chefs d’Etat, les plus grands athlètes des plus grandes
performances de l’humanité sur les indications de leur culture. Il faut
savoir que ce même jour, les 8 communes de Pékin ont battu tous les
recors de mariages. De même, toutes les maternités ont battu les
records de naissances. Non pas que seule la nature s’était exprimée
mais on a obligé par toute forme de mécanisme et de déchirement pour
faire sortir des enfants qui estimaient qu’ils n’étaient pas assez
vieux pour sortir.
Il faut savoir que les Grecs avaient leur
chiffre fétiche, et y croyaient, c’est le chiffre 1618 connu sous le
nom de nombre d’or. Les mossés, quant à eux, avaient aussi et
continuent de fétichiser un chiffre. C’est le chiffre 333. On a dit
dans le temps, qu’il y avait 333 autels sacrés dans le Mogho. Mais, en
dehors de cela, il faut savoir qu’il y a 333 organes du pouvoir nommés
à la cour impériale du Mogho Naaba de Ouagadougou. Il s’agit de 330
chefs administratifs politiques de commandement à divers degrés nommés
sur le grand Samandin (cour extérieure) du palais du Mogho, et (3)
trois grands serviteurs (Songue Nkasse Monse). Parmi ces 330 titulaires
de pouvoir, il y a les dignitaires qu’on peut appeler ministres d’Etat
(Koug-Ziidiba), les Kombeem Ba ou chef de canton, des chefs de villages
particuliers de tutelle directe du Mogho Naaba.
Là, on comprend ma tristesse, mon inquiétude. J’ai
l’impression en parcourant l’Afrique et mon pays, que nous n’avons pas
trop foi en notre culture pour l’exploiter à la construction de notre
temps comme certains peuples le font. Pour beaucoup
d’Africains, la culture, c’est du passéisme. Elle ne répond à aucune
science tangible, qu’il faut la dépasser, qu’il faut la méconnaître, et
même qu’il faut la combattre au profit d’autres cultures somme toute de
pays développés donc meilleures. L’Afrique, c’est le berceau
de l’humanité, elle ne peut pas n’avoir rien inventé, elle ne peut pas
ne pas permettre d’inventer. Mais, sa place dans le cheminement des
hommes ne peut être que de la dictée de ses fils. En nous
ramenant à ma modeste échelle, mes œuvres de 1976 publiées étaient déjà
enseignées en 1977 à l’Université de Oklahoma aux Etats-Unis. J’ai
prononcé, depuis 1973 à ce jour, environ 500 conférences dont au moins
le tiers sur la culture africaine et cela à 90% à l’extérieur de mon
pays et à la demande de ces pays extérieurs surtout hors du continent.
Cela me donne deux impressions. C’est que contrairement à ce
que l’Afrique pense le monde extérieur a foi en la culture africaine,
veut mieux la comprendre pour mieux l’exploiter. Le
déséquilibre des quêtes relativement de conférences prononcées laisse
aussi supposer que l’intérieur ne semble pas accorder l’importance qui
sied pour la recherche à la culture africaine et à nos cultures
internes.
Me
PACERE, l’opinion nationale a appris que le 9 août 2009 dernier, vous
avez été intronisé prince des Baoulés. Quel en est l’origine ?
Me F.T.P :
L’origine est en fait complexe et profonde. Il y a évidemment, mes
travaux, surtout ceux, portant sur le langage des tam-tams. Mes
premiers travaux sur le langage des tam-tams, que j’ai désigné par
Bendrologie ou science du langage tambourinaire ont été publiés en
1984. Il s’est fait qu’en Côte d’Ivoire un professeur émérite, Nignagora BOA,
avait travaillé et travaillait sur le même domaine mais lui sur les
tam-tams Akan et moi sur les tam-tams du Mogho. Sa science, il l’avait
appelé la Drumologie ; j’avais été invité en 1986 par la TV ivoirienne
à exposer mes théories de ce langage. C’est là qu’on a diffusé mes
travaux sur la matière et qu’on m’apprenait qu'un prof de l’université
d’Abidjan travaille sur la même matière mais de son peuple. Nous avons
eu à nous connaître, mais aussi et je le confesse à nous affronter
aussi bien sur les antennes des radios de CI et du BF où il s’est
déplacé.
Nous l’avons fait dans la loyauté et dans
la perspective de la défense, pleine, entière et sans compromis de la
culture africaine. On a voulu nous opposer, nous avons transcendé cela.
Je lui ai rendu visite en Côte d'Ivoire quand il était malade. Il m’a
rendu visite à Ouagadougou, quand j’étais malade. Nous étions devenus
les meilleurs amis du monde et il m’accueillait chaque fois par les
tambours parleurs Akan exécutés par ses étudiants chaque fois que je
lui rendais visite à l’unité de musicologie à l’institut des arts de
Côte d'Ivoire à Abidjan. Malheureusement, il s’est éteint et paix à son
âme. Pour beaucoup de ses adeptes et amoureux de la culture des Akan
plus précisément des Baoulés, le survivant que je suis de ce qu’il
était convenu d’appeler les deux maîtres du langage tambourinaire doit
défendre pleinement et totalement la culture ne ce
reste que tambourinée des Akan (Côte d’Ivoire) et du Mogho (Burkina
Faso), défendre toutes les cultures des deux pays et de l’Afrique
qu’animent les fibres de ces deux êtres. Je me suis retrouvé ainsi,
fils culturel des Baoulés, par mes liens de travaux avec le professeur Nignagora.
Au point de vue générale de mes relations avec les coutumiers de Côte
d’Ivoire pendant les durs moments de la crise ivoirienne, alors qu’on
ne pouvait pas oser le croire et le faire, j’ai été invité à Tiessalé
en 2003 pour présider un colloque qui a rassemblé plus de 50 rois et
chefs de CI ainsi que des universités de la CI, du Ghana, du Nigeria,
du Bénin. Le thème était : « Royauté, chefferie, traditionnelle et nouvelle gouvernance : Problématique d’une philosophie pour l’Afrique politique».
L’idée qui sous-tendait cela était qu'elle pouvait être la contribution
de la chefferie coutumière plus précisément de la gouvernance de la
tradition pour la quête de la paix. Le thème avait trait à l’actualité
brûlante que vivait la Côte d’Ivoire.
On comprend la considération
que les universitaires de ce pays, qui enseignent depuis 1997 mes
ouvrages, et les chefs coutumiers ont depuis à l’endroit de ma
personne. J’avoue que je ne m’y attendais pas, et ce fut l’une des
plus grandes surprises de ma vie. A la fin des échanges rituels et des
discours, on a annoncé à l’assistance que la reine Abla Pokou II allait
élever Me Titinga PACERE à la dignité de prince de la cour royale des
Baoulé-Akan.
Comme je l’ai dit, j’étais surpris. Et j’avoue que mes comportements
n’étaient plus d’assurances. Il y avait beaucoup de hautes
personnalités avec souvent même rang de ministres de la Côte d’Ivoire.
Sans compter la foule nombreuse composée de ressortissants de pays
limitrophes dont le Burkina Faso et lointains. Le rituel fut des plus
hauts en couleurs et en honneur des cultures africaines. Tout au long
du rituel, il me sera remis les insignes de dignité desquels il est
retenu un objet d’art une couronne, un long pendentif, une bague
stylisée, une chaîne et un bracelet stylisé, une épaisse lourde et
grande couverture de marque de la civilisation des Akan. Une paire de
chaussures de haut dignitaires. Un trône royal (chaise royale de luxe)
qui j’ai même pu amener au Burkina Faso. J’avoue que j’avais des
vertiges devant une telle élévation surtout devant une cour aussi
majestueuse de l’Afrique qui ne relève pas de mon groupe.
Avant
vous, le président Blaise COMPAORE a été élevé à la dignité de roi par
les chefs et rois de Côte d’Ivoire, de même que sa Majesté le Mogho.
Que peuvent signifier-pour vous de tels événements ? Une distinction de
chefferie coutumière au Mogho à une personne qui n’est pas de ce groupe
est-elle possible ?
Me FTP :
En fait, nos sociétés africaines n’apparaissaient fermées en coutume
qu’en regard des institutions. Mais ces sociétés se connaissaient, se
fréquentaient, s’appréciaient mutuellement. Elles n’étaient pas
hermétiquement à interdire toutes possibilités de contacts à l’échelon
inter individuel et de considérations réciproques en la matière. En
regard de valeurs objectives reconnues, il pouvait être même donné au
Mogho, surtout de notre époque avec l’ouverture que crée le temps, la
possibilité d’attribuer une dignité de cour à une personne qui peut ne
pas relever de la région et du groupe. Ainsi et à titre d’illustration,
SEM le Larlé Naaba Tigré a reconnu et attribué une dignité coutumière à
un européen, lequel a reçu la dignité de Manegr Naaba, c’est-à-dire
dignitaire de la construction, de l’édification du peuple. Il s’agit
d’une personnalité qui s’est intégrée par sa vie, son dévouement à la
cause d’un milieu social. Sous réserve des différentes cordialités de
cette personnalité dans le cadre de la construction au peuple, il m’a
été dit que l’intéressé s’est même construit une case pour y résider.
Les distinctions du genre peuvent ne pas être possibles dans certains
groupes ethniques. Mais dans nos régions, l’exclusion absolue est rare.
Il ne s’agit pas d’attribution d’activité ; cela n’est pas souvent
possible du fait que la personne n’est pas résidente et pourrait
paralyser le fonctionnement de l’institution. C’est une distinction
simplement honorifique qui traduit que le peuple concerné entend
reconnaître, honorer les travaux de la personne récipiendaire et
l’encourage à poursuivre parce que cela va dans l’intérêt des hommes et
des collectivités. Cela aussi crée des liens et des actions positives
de vases communicants entre la société qui honore et la personnalité
qui est honorée. Cela brise des frontières, crée, engendre, la
fraternité entre les peuples et les hommes. Une telle distinction
reconnue à Me PACERE par exemple lui indique un devoir de connaître
davantage les cultures du Mogho et la culture Baoulé et les cultures
burkinabè et les cultures ivoiriennes. En un mot, il s’induit en devoir
de défendre, les valeurs les cultures de l’Afrique.
Pour les
différentes distinctions dont vous avez fait état par la CI, elles ont
concerné au plus haut degré l’autorité politique, coutumière et une
personnalité dite de la culture ; c’est une marque de faire des deux
pays un même cœur à battre au rythme de la cordialité de la fraternité
de l’amitié.
Me, en un sens vous êtes également Baoulé, avez-vous quelque élément d’histoire des Baoulés dont vous êtes un digne prince ?
Me F.T.P :
Je viens d’être nommé de nature, je dois et sans délais assurer ma
fonction de défense de la culture Baoulé et partant ivoirienne outre
celle de mon pays et de l’Afrique. J’ai certainement beaucoup à
apprendre mais de ce qui m’a été déjà dit, l’origine des Baoulé
remontent à la reine Abla Pokou. (La reine actuelle qui m’a distingué
est Abla Pokou II) et cela m’honore encore.
Abla Pokou était la
nièce d’un roi Ashanti de la région de l’actuel Ghana, le roi
Ossei-Toutou. Sa résidence était Koumassi. Dans ce groupe de l’époque,
le trône se transmettant par les femmes, c’était la sœur ou la nièce du
roi et non pas son épouse qui devait enfanter l’héritier mâle. Le
prince, une fois au trône, partageait le pouvoir avec sa mère, mère qui
devenait de fait la reine mère. Désignée par un grand prêtre des
traditions, Abla Pokou avait vécu dans cette conception du pouvoir.
Cependant, des intrigues interviennent et même des guerres civiles dans
le royaume. Un certain Kussi arriva à usurper le trône d’or du royaume
Akan et s’y installa. Abla Pokou dut s’enfuir vers l’Ouest avec son
fils lequel était l’héritier légitime du trône. Pendant des mois dans
sa traversée, elle connut toutes sortes de difficultés, la maladie, les
fauves. Elle se retrouva un jour devant un fleuve, c’était le fleuve
Comoé. L’usurpateur Kussi avait envoyé à sa recherche pour les tuer,
elle et son enfant. Arrivé au bord du fleuve, il n’y avait aucune
possibilité de traverser, elle s’aperçut comble de malheur, que les
soldats de Kussi les avaient repérés et s’approchaient. Dans le groupe
de la reine et de son fils, il y avait des devins. Ceux-ci furent
consultés, l’oracle était terrible, le fleuve réclame un sacrifice qui
permettrait une possibilité de traverser. Il fut proposé des animaux et
cela fut refusé. Puis de captifs, puis même des enfants et les génies
du fleuve rejetèrent tout.
Le fleuve voulait du prince. Pour sauver la famille, la société qui se
déplaçait, Abla Pokou prit son fils, de trésor, le couvre d’or, et le
précipite dans le fleuve. Subitement, un immense fromager se place en
travers du fleuve et le couvre faisant ainsi un pont entre les deux
rives. Mystère aussi de l’histoire, des hippopotames et les crocodiles
du fleuve vinrent et constituèrent une large carapace faisant un large
pont et Abla Pokou et sa famille traversa sans encombre. Dès que le
dernier fut de l’autre côté du fleuve, l’arbre se relèvera subitement
et tous les animaux aquatiques disparurent. Les poursuivants furent
ainsi bloqués à leurs berges. Abla Pokou s’écria «l’enfant est mort»
(BA-OU-LE). Baoulé sera le nom que prendra le nom que prendra le
royaume qui sera constitué par et autour de Abla Pokou. Peuple qui
continue à rendre hommage et gloire à sa reine qui fut capable du plus
haut sacrifice, le sacrifice de son fils unique pour sauver tout le
reste de la communauté.
Abla Pokou, de maints coutumiers et historiens, qui s’est éteinte en
1760 restera marquée certes par le chagrin innommable dû à la perte de
son fils, mais auréolée de toute l’histoire de ce périple, de ce
courage sans lequel don hélas du fils, devait être décimé.
Frédéric ILBOUDO
Destruction du fétiche de Kalsaka « La destruction d’un site culturel est un crime… »
Destruction du fétiche de Kalsaka
« La destruction d’un site culturel est un crime… »
Dixit Maître Titinga Frédéric PACERE éminent homme de culture, de droit et de lettres
C’est un grand homme de lettres, de droit…, mais aussi et surtout de culture. Sa détermination, son engagement dans la défense, la promotion et la valorisation de la culture burkinabè, en particulier et celle africaine en général, fait de lui une référence sur le continent et au-delà. Qui mieux que lui pouvait éclairer les Burkinabè sur la destruction de fétiche de la commune rurale de Kalsaka, qui défraie la chronique, et dont nous avons traitée dans notre édition n°628. Nous l’avons rencontré pour mieux comprendre pour vous, tout ce qui entoure les fétiches et leurs mystères en pays mossi. Lisons plutôt !
Maître, en tant qu’homme de culture de ce pays, qu’est-ce qu’un « Teng-kugri » ou fétiche en milieu mossi ?
Me T F P : Un
Teng-kugri est composé de « Teng » qui signifie terre et « Kugri » qui
signifie pierre. Le Teng-kugri c’est dans la coutume des mossé, une
pierre de fondation d’une terre, c’est-à-dire d’un commandement. Son
sens s’est élargi, a recouvert des domaines un peu variés mais tous
liés à l’esprit d’emplacement de l’origine d’un commandement. Comme son
nom l’indique, c’est souvent un simple « Tambr-seongo » qui est la
simple pierre désagrégée qu’on utilise de nos jours justement pour les
fondations d’immeubles avec des d’agrégats (ciment,…) pour créer la
solidité appelée de nos jours cailloux sauvages. De tels lieux où sont
implantés le Teng-kugri, sont souvent appelés simplement, « Tenga » qui
signifie terre. C’est évidemment un lieu sacré, puisqu’il est
l’emplacement et la marque au sens réel de l’origine du commandement.
Il est sacré : à preuve, pour des grands rites de saison, on y immole
des moutons, des poulets voir des bœufs. Il est précisé que
généralement, le concept de teng-kugri concerne les Nakomsé,
conquérants, fondateurs d’empires et de circonscriptions
administratives politiques. Il ne concerne pas en général les
Younyonsé, bien que cela puisse exister dans leur zone, s’il s’agit
d’un village exclusivement de Younyonsé. Si une femme a des difficultés
pour enfanter, on peut s’adresser à cet endroit-là, qui signifie qu’il
est sacré. On l’implore pour avoir un enfant. Si la maternité
intervient, l’enfant portera, par exemple, le nom de Tenga (Terre) s’il
s’agit d’un garçon, Tengpoko, « Terre femme » ou fille de la « Terre ».
Ou Tendaogo « homme de la Terre. Terre ici n’est pas la terre au sens
courant mais le lieu sacré, qu’est le Teng-kugri.
Mais dites, Maître, un village peut-il avoir plusieurs fétiches ou Teng-kuga ? (pluriel de Teng-kugri)
Me T F P :
Le problème doit-être envisagé sous plusieurs angles. Au sens
étymologique, une circonscription administrative (royaume, canton,
village, quartier) ne peut en ce qui le concerne, avoir deux Teng-kuga.
Parce qu’il s’agit, par le Teng-kugri, de la représentation physique,
matériel, culturel de l’origine de la circonscription administrative.
Cependant, au point de vu espace géographique, il se peut que sur un
même plateau terrien, il y ait plusieurs Teng-kuga. S’il s’agit d’un
canton, par exemple, le canton au niveau de la gestion de l’autorité,
se trouve symbolisé en un endroit, au même lieu par exemple que le
village qui abrite le palais du chef. Il est donc possible qu’en ce
même lieu, peut-être espacé de quelque centaine des mètres, il y ait le
Teng-kugri du canton, celui du village, et même le Teng-kugri du
quartier. De nos jours, il y a une sorte de globalisation des termes.
Je prends le cas de mon village, Manéga pour compréhension. Il y a un
seul Teng-kugri portant ici le nom de Tenga comme je l’ai déjà précisé
à quelque cinquante mètre de la maison du chef. Mais sur le plateau
central de Manéga (un rayon de cinq cent mètres), il est implanté
treize lieux sacrés de la vie et de la protection du village. Chaque
lieu porte un nom, pas forcément faisant référence à sa fonction, mais
un nom qui le distingue des autres. Pour les anciens du village et pour
les villageois, chaque lieu sacré est appelé spécifiquement par son nom
et est connu d’eux. Mais sous l’angle du sacré, de nos jours l’ensemble
des lieux sacrés pour simplification pour le langage courant, est
désigné par les «Teng- kuga» de Manéga. Au pluriel ici, utilisé un peu
partout dans le Moogho, le terme Teng-kuga désigne dès lors l’ensemble
des lieux sacrés des circonscriptions administratives et coutumières.
Néanmoins, pour qu’un lieu reçoive cette appellation il importe qu’au
centre de ce lieu, il y ait des pierres (cailloux sauvages tel que
spécifié) pour matérialiser le cœur de ce sanctuaire et pour recevoir
les rituels des sacrifices de saison. Ainsi, à Manéga, il y a le
Teng-kugri « Teens-kaoongo » en traduction littérale, bosquet des
fétiches, ou bosquet des rites cultuels. Comme le nom de ce lieu
l’indique, c’est un bosquet en quelque sorte une petite forêt sacrée,
son bois est interdit à la cuisine ou pour quoi que ce soit, d’où sa
préservation jusqu’à nos jours. Il est pratiquement dans l’aire
actuelle du Musée de Manéga. Personne ne doit couper un morceau de bois
d’arbres ou même des pailles de ce sanctuaire. En son centre et depuis
le 12ème siècle il y a des cailloux qui matérialisent physiquement le
lieu sacré et le lieu des rites. Ce lieu, est appelé plutôt par son nom
que par la désignation de Teng-kugri. Il y a même un boa en ce bosquet
qui sort de temps à autre et qui m’effraye moi-même, et déjà aperçu par
des touristes du Musée. Il est interdit de le toucher. J’ai également
interdit de le toucher du fait que pratiquement, j’ai la garde morale
de ce lieu, qui, comme je le dis, est dans l’aire du musée.
Qu’est-ce qu’un Teng-kugri peut représenter pour un royaume, un canton, un village, un quartier, une famille, un individu ?
Me T F P :
Le Teng-kugri porte sur une circonscription administrative coutumière.
C’est peut-être d’un royaume, d’un canton, d’un village, d’un quartier.
Il est également le centre de la circonscription administrative, pas au
sens géométrique ; mais au sens de l’existence de la création du point
d’ancrage et de cette circonscription administrative. A priori, une
famille ou un individu n’a de Teng-kugri. Pour les familles, dans
certaines régions, il y a un lieu sacré dans la cour, qui marque le
lieu central au sens coutumier de l’implantation de la maison
familiale. On l’appelle « Siman-Tenga ». Il n’est pas souvent
matérialisé, du fait qu’il est dans la cour. Mais, on connaît son
emplacement au jour du rituel de saison d’adresse aux ancêtres, tel que
le « Basga » (au niveau du plateau central) ou « Filga » qui se
pratique dans la région du Nord. On le reconnaît parce que le chef de
famille doit toujours se mémorer ce lieu parce que c’est là qu’il doit
immoler les poulets, au jour annuel de la fête de saison. Il n’est pas
forcément à côté de la case du chef de famille. Celui qui est à côté de
la porte de la case du chef de famille, porte le nom de « Sigré ». Le
Teng-kugri est donc un sanctuaire d’installation et de marque physique,
réelle, d’une circonscription administrative.
Quelles sont les conséquences pour les populations de la localité si ce Teng-kugri est détruit par inadvertance ?
Me T F P : On
ne peut pas détruire un teng-kugri par inadvertance. Parce que le lieu
est reconnu de tout le monde. Un étranger n’a pas à aller fouler le
lieu de ses pieds. Souvent même, aucun sentier ne conduit directement à
un Teng-kugri. Un sentier dans un village peut passer à 5, 10, 20
mètres, mais aucun sentier ne conduit à un Teng-kugri. Les rituels pour
le Teng-kugri ne sont jamais fréquents. Souvent une fois, deux fois
trois, fois par an, à moins de nécessité extrême. Du fait qu’on n’y va
pas, que le lieu n’est pas fréquenté, les sentiers ne conduisent pas à
un teng-kugri. On ne peut pas aller à ce lieu par inadvertance.
Quant à la destruction du Teng-kugri, on comprend, puisque c’est
l’origine de la création matérielle de la circonscription. Création qui
passe forcément le 1er jour par des invocations aux ancêtres, des
adresses de sollicitations de bonheur et de paix aux ancêtres. C’est
dire donc que la destruction d’un Teng-kugri signifie, la destruction
morale de la circonscription administrative par violation des liens de
respect que les vivants du jour ont envers Dieu, les ancêtres, les
devanciers. C’est pour cela que la destruction d’un Teng-kugri, est
plus qu’un sacrilège. La destruction d’un site culturel est un crime.
Elle suppose une rupture volontaire qu’une tierce personne opère, pour
rupture des liens entre les vivants et les morts. La coutume évidemment
est pour le milieu, la destruction de la vie de la personne qui a
détruit le Teng-kugri ou, dans le milieu accepter, acquiescer, une
rupture définitive qu’on impose à la localité envers ceux qui ont créé
cette localité et leurs descendances.
Et si c’est intentionnel, est-ce les mêmes conséquences ?
Me T F P : Comme je l’ai dis, le problème de l’intention ici, est
complexe. Parce que s’agissant du Teng-kugri, et pour le milieu
culturel du fait qu’aucun sentier souvent ne conduit à ces lieux, la
profanation est toujours volontaire. C’est dire que pour le milieu et
pour certaines localités notamment les Tansoaba ou (gens de guerre),
qui ont des armes, l’expression du « Burkina » (homme intègre), « Kuum
saon yandé », (la mort vaut mieux que l’humiliation). Seule donc la
mort de l’auteur peut réparer si elle peut réparer, l’humiliation.
Dans le cas de Kalsaka, on a retrouvé les restes des fétiches. Ces restes ont-ils les mêmes pouvoirs que l’authentique ?
Me T F P :
Je viens de rentrer au pays. J’avoue que l’opportunité, ne m’a pas
encore conduit à Kalsaka pour que je connaisse ces coutumes
particulières, donc son Teng-kugri, même si évidemment celui, qui
relève des principes généraux du sacré. Le Teng-kugri, comme je l’ai
dis, c’est souvent de grosses pierres désagrégées implanter dans le
sol. On n’a pas à les déplacer, parce qu’elles sont liées à un
emplacement géographique. Leurs puissances cultuelles relèvent de leur
présence au lieu de leur implantation.
Un Teng-kugri d’une
circonscription administrative ne répond plus des origines réelles
d’implantations de cette circonscription administrative. Le Teng-kugri
n’a de sens, de valeur que rester dans son lieu d’origine
d’implantation, parce qu’il signifie le lieu d’emplacement ou de
référence d’origine du village.
Je signale qu’en raison de certaines diasporas, une communauté qui se
déplace et qui arrive en un certain lieu peut faire d’une colline, son
Teng-kugri. Cela peut répondre d’un dicton pour un groupe qui estime
n’avoir pas eu un pouvoir qui leur revenait selon eux, et qui ont pris
la fuite pour être arrêté dans leur marche par une colline. Le dicton
dit «Koom san zoé ta tanga a taa tèka» (l’eau qui a atteint la
montagne, a atteint son terminus).Ce point d’arrêt que marque la
colline peut-être appelée le teng-kugri de cette circonscription
administrative. Ce sont des particularités de région sinon, le
teng-kugri est comme je l’ai dit, la pierre ou les pierres prisent pour
poser qui marquent l’origine de la circonscription administrative,
coutumière. J’ai dis que je ne connais pas le Teng-kugri de Kalsaka
mais de ce que j’ai pu entendre et lire dans la presse, il semble qu’il
s’agit d’un rocher, la matière évidemment est complexe parce que pour
certaines zones, un tel Teng-kugri est le rocher. Dans sa
configuration, dans sa réalité matérielle, dans son esthétique il doit
rester tel. Je m’en remets à la décision ou à l’analyse que pourraient
avoir, les anciens de ce village.
Mais pour certains villages, des morceaux quelque peu éparpillés,
ramenés. Mais il en faut l’intégralité, qui doivent passer par des
interrogatoires auprès des ancêtres pour comportements à avoir. Les
temps ne sont plus les mêmes et les comportements des hommes et les
nécessités de la vie modernes peuvent ne pas correspondre à la
nécessaire connaissance naturelle des autochtones en regard de leur
sacré. Sous cet angle, les mossé disent que « l’étranger ne connaît pas
les trous ». Mais cela signifie aussi que ne connaissant pas les trous
et voulant bien marcher dans le village, l’étranger se doit de se
renseigner. Cela est un signe de respect et de considération pour
lui-même et pour les autres. La stabilité générale, la paix, a concerné
le village et l’étranger passe par cette prudence de la part de
l’étranger, de tout faire pour connaître l’autre et éviter des
désagréments pour l’autre et lui-même. Ainsi dans notre temps actuel,
pour de telles situations, la coutume peut être claire et sans
équivoque. Je regretterai personnellement si la destruction a pu être
opérée à l’insu des autorités coutumières parce que le malaise devient
certain et la solution difficile. A moins qu’il y ait de la tolérance
des hommes.
Y a-t-il possibilité de réparer un tel préjudice ? Et comment ?
Me T F P :
Il est difficile dans mon entendement, de réparer un tel préjudice
surtout si le site cultuel a connu des désagréments. La seule
réparation possible, c’est de remettre la situation en l’état. Comment,
j’avoue que je ne le sais pas. Il importe surtout dans mon entendement,
qu’on garde et préserve en l’état, ce genre de lieu de culte avec leurs
compositions physiques.
Si le mal est déjà fait, je crois que le
problème ne peut se poser que dans l’histoire et les habitudes du
milieu. C’est dire qu’il faut s’en remettre à l’autorité coutumière du
milieu entourée de son conseil, pour des recherches de solutions si
solution existe.
Y a-t-il déjà eu un ou des précédents du genre dans notre pays, et dont vous avez connaissance ?
Me T F P :
Je le regrette beaucoup pour notre pays, de nombreux les lieux sacrés
de Teng-kuga ont été détruits par la colonisation et souvent hélas
parachever par notre vie actuelle des lotissements. Prenant le cas de
Ouagadougou, le lieu sacré de culte appelé « Zom-toeega » était dans la
zone complètement dénudée aujourd’hui, de l’ancien camp fonctionnaire
de Ouagadougou : entre l’aire de la paroisse cathédrale et la mairie
centrale. En cette zone également était un site des plus importants de
la capitale, la tombe du Moogho Naaba ZOMBRE qui recevait des rites
séculaires. Et pour cause, c’est le Moogho Naaba ZOMBRE qui a fait de
OUAGDOG (Ouagadougou), la capitale définitive du Moogho, qui deviendra
la capitale du Burkina Faso. La tombe et le lieu sacrés ont été rasés.
Le lieu sacré « Teens-kaongo » était situé côté Nord-est de l’actuelle
Avenue du Moogho Naaba Wobgo (ancienne avenue Bassawarga), ce lieu
sacré et son Teng-kugri en particulier, recevait les couples stériles
en quête d’enfants). Les sites sacrés détruits à Ouagadougou sont
nombreux et c’est dommage. Il y a même, des lieux sacrés de rites
millénaires à Ouagadougou et ailleurs qui ont été expropriés par l’Etat
pour cause d’utilité publique. A ma modeste échelle, je le déplore
beaucoup parce que plusieurs de ces lieux ne sont pas seulement des
centres d’expressions religieux, mais peuvent comporter des valeurs et
des enseignements qui connu, auraient contribué, à la construction de
nos peuples. Je vous cite un exemple.
J’ai préservé à cette fin, en
truisant tous les lieux sacré de Manéga afin que le lotissement
n’intervienne, des monuments, pour physiquement les matérialisés à
interdire pratiquement à moins d’inconscience, leur destruction. Sur le
plateau central de Manéga, il y a le teng-kugri appelé «Kinkir-gogo»,
essentiellement institué pour la chasse. C’est dans ce lieu qu’est
construit le rituel de «Kinkir-gogo», c’est dans ce lieu, qu’il y a des
animaux de toute nature et un monument que j’ai construit. Le rituel du
Kinkir-gogo est annuel. Au jour du rituel, toute la population du
village est conviée en ce lieu, les anciens procèdent à leur rite et
immole un poulet, qui ne sera pas consommé. Il sera grillé, séché et
accroché à une branche d’arbre. Toute la population est conviée dès
lors, à aller dans la brousse et tuer les animaux sauvages. Les animaux
qui seront tués ne seront pas consommés immédiatement, mais, seront
frits et conservés. Pendant une semaine, la population va en brousse et
revient avec ce qu’elle a pu tuer comme animaux sauvages. Au dernier
jour, tous les chefs de famille sont conviés à amener des céréales, des
ingrédients de cuisine, tout ce qui a été rassemblé de viandes sauvages
est préparé et mangé ensemble par toute la collectivité.
Seulement, en dehors de cette semaine, qui a vu tuer autant d’animaux
sauvages que possible, il était interdit à la population de tuer les
animaux sauvages. Il y avait dans la population, sur une superficie qui
atteignait coutumièrement 20 sur 30km, pas plus de cinq chasseurs
coutumiers. Ils ne pouvaient évidemment pas détruire au cours de
l’année abusivement, les animaux sauvages qui continuaient à pulluler
dans la région.
A réfléchir et à analyser, avec notre vision moderne des sociétés, ce
Teng-kugri, sanctuaire Kinkir-gogo par son existence, son rite, ses
prescriptions signifient que l’homme des traditions a vu que sa vie
imposait un équilibre avec la nature. On ne pouvait pas tuer n’importe
comment des animaux sauvages. De même, il y a dans la région, un
sanctuaire où il est interdit la coupe abusive du bois. Pour ces
milieux, l’arbre est une vie qui doit être respectée. La coupe abusive
du bois est contraire à nos traditions. A l’enfance, j’ai même assisté
à un rituel d’un masque partie d’un Teng-kugri, qu’il anime et avec son
fouet il devait frapper le tronc de tous les arbres fruitiers de la
région, pour en autoriser la consommation parce que les fruits sont
mûrs de l’appréciation du Teng-kugri, dont relève ce masque. De nos
jours, les enfants tombent malades, parce qu’ils ont mangé des karités
ou des raisons sauvages verts. Si ces garde-fous de rites de Teng-kuga
même organisés autrement pour notre temps existaient de nos jours ou
pouvaient recevoir application des principes de nos jours, l’homme
pourrait vivre dans un milieu plus équilibré, plus sain, pour plus
cordialité de fraternité et d’unité. C’est pour cela qu’il faut éviter
le vandalisme actuel, la chasse inconsidérée aux sorcières que nous
connaissons de notre temps contre les valeurs ancestrales, qui,
n’emportent pas uniquement et exclusivement des éléments du religieux.
Encore que cela mérite respect, mais aussi des éléments de protection
et de construction de la vie sociale à être connu et à être exporté par
nos gouvernances modernes.
Une compensation financière est-elle possible et envisageable ?
Me T F P : A
mon sens, une compensation financière est non seulement inopportune,
non seulement interdite, mais surtout elle est injurieuse.
Il
faut savoir que l’argent, en tant qu’argent, et même en tant que cauris
de l’ancien temps, n’entrent de ma connaissance, dans aucun rituel
sacré. On a utilisé l’argent dans le cadre civil par exemple à entrer
dans la composition de la dote. Mais là-aussi, à ne relever que du pur
symbole. A titre d’illustration du civil, jusqu’aujourd’hui à Manéga et
depuis un certain temps (l’existence de la monnaie moderne) il est
réglementé que la base de la somme monétaire, est le chiffre 100, (100
franc en mooré soit 500FCFA). Le chiffre coutumier symbolisant l’homme,
est le chiffre 3, et celui, symbolisant la femme le 4. Dans la
composition de la dote, la somme à offrir au père de la jeune fille est
de 130 franc mooré (500F CFA plus 150F CFA) pour la mère, la somme à
lui remettre est 140 franc mooré (soit 500F CFA plus 200F CFA). C’est
dire que l’argent n’a pas un rôle financier important dans la gestion
de la coutume. Même, si on est milliardaire, on ne peut dépasser ce
montant.
Ramener à la destruction d’un lieu sacré, il appartient aux autorités
coutumières pour gérer le problème avec les devanciers, les ancêtres,
et de proposer la compensation, qui s’impose si une solution existe.
Mais à mon sens, il faut éviter de mettre l’argent dedans. Je suis
conscient, surtout de nos jours, que justement, des institutions
financières, des sociétés commerciales peuvent jouer sur l’exploitation
de la terre matérielle de laquelle en particulier, peuvent emporter
l’existence d’un sanctuaire souvent millénaire.
En dehors de la superficie matérielle, culturelle du sanctuaire à ne
pas être mise en cause dans toute tractation et de réparation qui
m’apparaîtrait indécente et anti-coutumière, il serait de justice que
les populations attenantes à ce sanctuaire, dont la vie rituelle et
sociale relève de ce sanctuaire, partagent les mérites, les attributs,
les potentialités de toute nature d’une terre, qui est la leur et celle
de leurs ancêtres. Et tout exploitant n’a pas le droit d’agir ici en
terrain conquis.
Mais qu’au moins au triple niveau administratif, judiciaire ou politique des solutions peuvent être trouvées ?
Me T F P : Je crois au fond, pour ma part que ce problème, n’a pas à être élevé au niveau judiciaire.
Avant la justice, il y a d’autres comportements à observer qui
éviteraient des dérapages dans les milieux concernés, d’où la
nécessaire implication de l’autorité administrative et de l’Etat. Sur
le site d’exploitation concerné, il m’apparaît indiqué que des enquêtes
préalables soient faites auprès notamment des responsables coutumiers
de la localité. Des dispositions ici, donc préalables devraient être
prises pour éviter des incompréhensions avec les occupants coutumiers
des zones, même si par principe l’Etat serait le propriétaire et donc
gestionnaire exclusif de ces périmètres. Les désordres sociaux doivent
être prévenus, anticipés quant à la connaissance et éviter en cas de
comportements regrettables ultérieurs sur le site par quelque personne
physique ou morale que ce soit. A mon sens, au besoin, les dispositions
de forme d’exploitation peuvent être envisagées même par des travaux
souterrains pour préserver certains sites névralgiques. Par ailleurs,
qu’il s’agisse de sociétés nationales, ou en internationales, la
courtoisie des règles coutumières des localités doivent être
respectées. Il serait souhaitable que si une zone sensible était
relevée dans un milieu coutumier, que le problème soit directement
élevé auprès de l’autorité administrative immédiate et des autorités de
tutelles en cas de nécessité pour une gestion de l’ensemble, quelque
peu à trois, l’Etat, l’organisme d’exploitation de la mine et
l’autorité coutumière, celle-ci, a droits à des exposés à l’autorité
administrative et à être défendus. Les milieux traditionnels, il faut
l’accepter, ne peuvent pas par eux-mêmes maîtriser les méandres des
conventions et leurs incidences. Dès lors leurs droits coutumiers
risquant d’être atteint selon eux par une tierce personne, il vaut
mieux que leurs droits allégués soient d’abord intégralement exposés
auprès de l’autorité administrative immédiate pour gestion avec eux.
Ces droits s’ils sont grave atteints peuvent avoir échappé à l’autorité
administrative suprême, qui a signé la convention. En raison, de cas de
force majeure survenue à la mise en application d’une convention,
l’Etat peut réexaminer la situation pour éviter un dérapage et qu’une
situation ne porte atteinte à la paix sociale. Mais, si l’autorité
coutumière entre directement en négociation avec la personne, physique
ou morale bénéficiaire des droits d’exploitations, alors que cette
autorité coutumière n’est pas nantie des bagages essentiels de défense
de ses droits, elle peut poser des bases qui pourront contrarier
ultérieurement la stratégie de défense des droits coutumiers. Des
solutions peuvent intervenir, mais il faut que les bases, ne soient pas
déjà faussées. Le terrain est complexe et glissant et il faudrait de la
prudence pour tout le monde. Je pense à l’institution, qui a bénéficié
des droits d’exploitations et le milieu coutumier, dont relève le site
d’exploitation. Pour ces genres d’incompréhension, il vaut mieux
toujours prévenir que guérir, parce que si l’on ne prévient pas par des
mesures préalables, on peut déboucher sur des situations qu’on ne peut
pas gérer. Nous déplorons à travers le continent des populations
toujours en guerre contre les sociétés d’exploitations, parce que les
bases légitimes des droits des uns et des autres, à tord ou à raison
ont été méconnus. Comme je l’ai dis, ne serait-ce que pour les milieux
coutumiers que je connais, des ententes préalables peuvent toujours
intervenir à condition que l’on respecte les populations autochtones et
que l’on n’agisse pas en terrain conquis même muni d’un parchemin..o
Frédéric ILBOUDO
Kalsaka Mining L’or, le fétiche et la discorde
Kalsaka Mining
L’or, le fétiche et la discorde
Kalsaka, commune rurale située à 150 km de Ouagadougou a une population de plus de 48 000 personnes reparties dans 51 villages. Chrétiens, musulmans, et animistes y vivent en parfaite symbiose. La religion traditionnelle compte beaucoup plus d'adeptes. Depuis le 4 octobre 2009, les populations de cette commune rurale ne savent plus où donner de la tête ; le chef en premier. En effet, Kalsaka mining SA (du nom de la société minière détentrice du permis d’exploitation de la mine) a profané le fétiche de la localité. A la rencontre date-butoir du 23 octobre 2009 donnée aux responsables de la mine après celle du 17 octobre pour retrouver et restituer le fétiche, rien de concret n’a été apporté. A Kalsaka, nous avons vu une population inquiète, mais déterminée à faire réparer le sacrilège.
Devant la cour royale de Naaba Sigri, l’animation est exceptionnelle. Sur les visages, on lit l’inquiétude chez les sages. Les jeunes, eux visages fermés, murmurent. On sent l’énervement. Il est 8 h. Derrière l’attroupement des jeunes et des adultes, deux grosses cylindrées. Sur les portières avant sont estampillés « Kalsaka mining SA ». La délégation de Kalsaka minig est conduite au plus haut niveau par la représentation-résidente Mme Djénéba NANA, sous le grand fromage de la cour royale. Le trône du chef est là, mais lui-même est toujours dans sa demeure. Des consultations restreintes ont cours. Des personnes, très âgées pour la plupart, entrent et sortent de la concession de Naaba Sigri. Plus le temps passe, plus les gens de viennent de plus en plus nombreux. A 9h, un envoyé du chef informe l’assistance que la réunion va accuser du retard. La raison, les autorités provinciales ont dépêché des représentants pour assister à la rencontre. Les gens s’impatientent. « Vous voyez ces gens n’étaient même pas prévus pour assister à la rencontre et c’est eux qui mettent tout le monde en retard. Si j’étais à la place du chef, on commence la rencontre sans eux… » S’insurge un jeune devant la cour royale. Il parle de la délégation provinciale. Ce qui fait sourire le policier en faction qui attend ses supérieurs. Quarante-cinq minutes plus tard, la délégation de l’autorité provinciale arrive.
Une intentionnelle profanation ?
«Ils
sont enfin là » annonce un jeune qui freine son engin devant ses
copains. Derrière lui se gare aussi un véhicule. A l’intérieur, quatre
hommes y descendent. La réunion peut commencer. Le chef demande à ce
que les représentants de l’autorité se présentent. On apprendra alors
qu’ils sont : le secrétaire général de la province, l’adjoint au maire,
le commissaire de police, et le SG de la préfecture de Kalsaka. C’est
alors que le porte-parole de Naaba Sigri prend la parole et donne
l’ordre du jour. L’adjoint du maire de Kalsaka , Mathias SAWADOGO lui
coupe la parole : « S’il vous plait chef, tout le monde ne s’est pas
présenté, ceux qui sont derrière, c’est qui ? ». Parlant des
journalistes. « Ce sont des journalistes » rétorque un jeune dans
l’assistance. « Qui les a convoqués ? Il faut qu’ils se présentent
tous. » Avant d’ajouter : « Surtout, pas de sensationnalisme messieurs
les journalistes ! Nous ne voulons pas du sensationnel dans cette
affaire ». Les journalistes se présentent. La rencontre commence. Un
seul point est inscrit à l’ordre du jour. «Le 17 octobre dernier, nous
avions donné 10 jours aux responsables de la mine pour nous retrouver
notre fétiche, ils sont là, nous allons écouter ce qu’ils ont à nous
dire…» rapporte le porte-parole de Naaba Sigri, M Abdoulaye OUEDRAOGO
président des CVD. La parole est donnée à la représentante-résidente.
« …Nous sommes conscients de la gravité de la situation et de ce que
cela peut engendrer. C’est pourquoi nous sommes là pour qu’ensemble,
nous puissions trouver la solution. Suite à la rencontre du 17 octobre
dernier, nous sommes allés et nous avons cherché. Nous avons trouvé des
cailloux et nous vous demandons de déléguer des gens pour venir
authentifier ces cailloux…» Les tractations pour aller authentifier
lesdits cailloux commencent. L’adjoint au maire propose que les jeunes
évitent de prendre la parole. Ce que les jeunes contestent. Les
anciens, eux tempèrent les ardeurs. Le ton monte. L’approche du
problème par l’adjoint du maire est décriée. Le SG de la province du
Yatenga M. Abdoulaye OUEDRAOGO intervient : « Le haut-commissaire m’a
envoyé ici ce matin, vous demander honorable chef, ainsi qu’à toute la
population de chercher dans cette regrettable affaire une solution de
paix. Certes la situation est grave, mais on peut toujours trouver une
solution car c’est peut-être par inadvertance que cela est arrivé….»
Il n’en fallait pas plus pour réveiller le courroux de certains. A en croire la population, l’acte posé par les responsables de la mine est intentionnel. « Quand les responsables de la mine venaient pour l’implantation de la mine, à leur demande, nous leur avons indiqué les emplacements de tous les sites cultuels. Ils nous ont rassurés que tout sera fait pour préserver et protéger ces lieux. Quelque temps après, un des responsables notamment M. ALERA est venu demander au chef s’il était possible de déplacer le fétiche. Ce que le chef a refusé. Il a demandé s’il était au moins possible de protéger le fétiche avec une clôture. Le chef leur a dit en son temps que c’était une bonne chose d’ailleurs. Franchement, qu’on ne vienne pas nous dire aujourd’hui après toutes ses requêtes que c’est par inattention que cela est arrivé. L’acte est intentionnel et ils vont le réparer. Si ce n’est pas intentionnel, pourquoi viennent-ils avec des enveloppes pour voir le chef ? » Plus d’une trentaine de minutes de tractations après, le chef donne l’ordre aux 13 personnes qui étaient allées le 17 octobre dernier pour constater les dégâts de la destruction du fétiche de partir à la mine pour l’authentification.
Les journalistes indésirables
Avant
même que la délégation désignée par Naaba Sigri ne quitte la cour
royale pour la mine, le SG et sa suite demandent à partir. Sur le point
du départ pour la mine, les journalistes tentent d’arracher quelques
mots à Mme Djénéba NANA. Refus catégorique. Les journalistes suivent la
délégation royale pour être témoins de l’authentification. Là, un
policier les interpelle : « Les autorités de la mine ont donné des
instructions. Elles disent que si vous n’avez pas fait de demande
d’audience, vous ne pouvez pas avoir accès à la mine encore moins
accompagner les délégués du chef ». Les « gratte-papier » rebroussent
chemin. Dans la cour royalement, les débats continuent. Chacun y va de
son réquisitoire. Pour certains, il faut que les travaux s’arrêtent à
la mine jusqu’à ce qu’on retrouve le fétiche. Les patriarches et
responsables coutumiers sont interpellés. « Que faut-il faire si les
envoyés du roi ne reconnaissent pas le fétiche ? » S’interroge un
jeune. « Ne vous inquiétez pour ça nous allons interroger les mânes des
ancêtres pour savoir s’il s’agit du fétiche ou pas ? » Répond un
ancien.
Des morts mystérieuses à Kalsaka
Sous le coup de midi, les envoyés de Naaba Sigri sont de retour. Les
visages sont graves, fermés. A peine ont-ils pris place que des
questions fusent. Qu’avez-vous trouvé ? Qu’avez-vous à dire ? Naaba
Sigri hausse le ton à l’endroit des jeunes. Je demande le silence. Les
gens se taisent. Naaba Sigri donne la parole à Abdoulaye OUEDRAOGO.
« Chef, nous sommes partis, nous avons vu, mais ça ne ressemble pas à
notre objet. Ils nous ont montré des cailloux, mais, aucun de ces
cailloux ne ressemble au fétiche. Pire, là où on nous les a montrés,
c’est encore loin du lieu où le fétiche était implanté. Les anciens
sont là, ils vous diront…» A dit Abdoulaye OUEDRAOGO.
Ce que confirme un ancien qui était de la mission d’authentification. Stupeur ! Résignation, colère. « Que faut-il faire ? » S’interroge un aîné. Là-dessus, après concertation, les anciens décident : « Nous allons interroger les mânes des ancêtres dès lundi et ils nous diront si les cailloux qu’on vous a montrés sont les fétiches ou pas. » Sur le champ, Naaba Sigri envoie informer le Tensoaba (le sacrificateur) que le rite aura lieu le lundi aux environs de 16 heures. Cette décision devait mettre fin à la rencontre, mais c’était sans compter avec la détermination des fils et filles de Kalsaka. Le débat reprend de plus bel. Les nerfs sont à vifs, surtout quand l’un des envoyés dit que sur la colline, le travail continue. « Il faut qu’ils arrêtent les travaux jusqu’à ce qu’on retrouve le fétiche… » Lance quelqu’un. Des voix s’élèvent pour dire que ce n’est pas opportun. «Si pendant les dix jours qu’ils ont eu pour rechercher le fétiche, ils n’ont pas arrêté le travail, ce n’est pas les trois jours qu’ils vont travailler avant qu’on interroge les ancêtres qui vont déranger quelque chose. » Affirme Drissa. Sa position est suivie par plus d’un. En définitif le chef tranche : « On les laisse travailler… » Rendez-vous est pris lundi 26 octobre avec un représentant de la mine pour le rituel du sacrifice d’authentification.En définitive, les sacrifices ont été exécutés le mardi 27 uctobre 2009. Selon Abdoulaye OUEDRAOGO, président du CVD et porte parole du chef,les ancêtres ont acceptés les offrandes sacrificielles, signe que les cailloux que Kalsaka mining a retrouvé sont des restes du fétiche. Parcontre Abdolaye OUEDRAOGO souligne qu’il est très impératif que les restes du fétiche soitent retrouvés dans de metlleurs délais de l’avis des anciens. Pour l’heure, Kalsaka compte ses morts. Aux dires des sages depuis la survenue du sacrilège, des morts mystérieuses ont eu lieu dans la commune. En l’espace de quatre jours, il y a eu quatre morts ; Une femme a fait une chute d’un arbre et en est décédée. Une autre est morte en laissant derrière elle, deux enfants de bas âges… Des morts au nombre de quatre qui sont inexplicables. Elles seraient la résultante de la profanation. Vrai ou faux ? La question reste posée, mais une chose est sûre, Kalsaka n’a pas encore retrouvé la totalité du fétiche, retrouvera-t-il sa quiétude ? Affaire à suivre…o
Frédéric ILBOUDO
Kalsaka mining SA en bref
Kalsaka
mining est une société anonyme de droit burkinabè, dénommée Kalsaka
Mining SA. Succursale de Cluff mining SA le capital est réparti entre
Cluff mining (78%), Investissement moto agricole réalisation Burkina
(IMAR-B) pour 12% et l’Etat burkinabè (10%). Les estimations de l’étude
de faisabilité font ressortir que la production sera de 22,5 tonnes
d’or métal et que la durée de vie prévisionnelle de la mine est de 6
ans. Le permis d’exploitation du gisement a été octroyé en juin 2004.
L’usine de traitement a une capacité d’environ 4 500 tonnes de minerai
par jour. La spécificité de la mine d’or de Kalsaka est que le
traitement de l’or se fait à ciel ouvert classique.
Il y a aussi
un traitement de lixiviation (lessivage) en tas pour une capacité
initiale d’un million de tonnes de minerai et de soixante mille onces
d’or par an. Kalsaka Mining SA s'est engagée à réhabiliter le site
d'exploitation, conformément au plan de préservation retenu par ladite
étude. La société minière va verser annuellement au Trésor public au
titre des impôts, taxes et royalties, 836 millions de francs CFA et
améliorera la balance des paiements du Burkina à hauteur de 10milliards
de FCFA. La société Kalsaka SA c’est selon les autorités 860 millions
de francs CFA pour le suivi et la gestion de l’environnement. Kalsaka
Mining SA, a pour Président Directeur Général (PDG), M Algy Gordon
Cluff et comme représentant-résident Mme Djénéba NANA..o
Frédéric ILBOUDO
ORCADE aux côtés des populations
La profanation du fétiche de Kalsaka n’aurait pas eu d’échos si l’ONG ORCADE, n’avait pas sonné le tocsin. En mettent l’affaire sur la place publique via les médias, Moses KAMBOU directeur exécutif de l’ONG, à donner des forces aux populations de Kalsaka. Des forces qu’elles n’allaient certainement pas avoir, si l’affaire était gérée entre les « quatre murs » de la commune. L’Organisation pour le Renforcement des Capacités de Développement (ORCADE) est une association burkinabè créée en fin 2001. C’est grâce à sa vigilance de cette association qui travaille aux côtés des populations que Kalsaka fait aujourd’hui l’actualité au Faso. « Nous sommes déterminé, et nous suivrons cette affaire jusqu'à son aboutissement total. Notre pression su Kalsaka mining SA ne se limitera pas seulement au Burkina. Non. Nous saisirons nos partenaires au niveau international pour que la pression soit à tous les niveaux afin que les responsables de Kalsaka mining comprennent qu’on ne peut pas et on ne doit pas profaner impunément, les sites religieux… » A laissé entendre Moses KAMBOU. Les objectifs de l’ONG sont les suivants : participer au développement durable des ressources humaines ; lutter contre la pauvreté ; renforcer les capacités des ressources humaines en vue de contribuer à l’amélioration de la qualité de vie des populations ;… ORCADE a une noble mission qui est de renforcer les capacités des citoyens burkinabè. En leur faisant prendre conscience de leurs capacités intrinsèques, ORCADE/Burkina donne des outils aux populations pour travailler à construire leur propre développement durable. Ainsi, les couches défavorisées sortiront de la situation de dépendance afin de pouvoir contribuer au développement national...o
Frédéric ILBOUDO
L’or ne brille pas pour tout le monde à Kalsaka
Entre
les populations de Kalsaka et les responsables de Kalsaka mining SA, ce
n’est pas le parfait amour. En effet, depuis le démarrage effectif de
l’exploitation de la mine jeudi 30 octobre 2008, l’espoir des
populations est toujours vain. «Il n’y a aucune retombée pour le
village. Il n’y a jamais eu de cahier de charges, aucune infrastructure
construite jusque-là et ce depuis septembre 2008, sans oublier les
dégâts sur l’environnement, la santé des femmes et des enfants» Lance
un fils du village venu spécialement de Ouagadougou pour la rencontre.
« Le débat n’est pas là. Nous sommes là pour parler du fétiche, on ne
peut pas intégrer cette situation dans cette affaire. C’est deux
affaires distinctes que nous devons traiter distinctement » rétorque
Wahab O. Pourtant on avait annoncé que : « les activités d’exploitation
de Kalsaka mining S.A entraîneront la création d’environ 200 emplois
permanents et autant de nombreux emplois indirects liés entre autres,
au transport, à la restauration et au commerce général », avait affirmé
Monsieur le ministre des Mines, des Carrières et de l’Energie,
Abdoulaye Abdoul Kader CISSE. Ce qui faisait dire au préfet dudit
département que : « le lancement officiel des travaux de cette mine
d'or viendra résoudre un tant soit peu l'épineux problème du chômage et
favorisera le développement de la localité » Si tel est le cas, sachez,
Monsieur le préfet qu’ils ne sont pas plus 10 les fils et filles de
Kalsaka qui y travaillent. Quant à ces nombreux emplois indirects liés
entre autres, au transport, à la restauration et au commerce général
dont vous faisiez cas, rien n’a encore poussé. Combien de Burkinabè
travaillent à Kalsaka mining SA sur les 200 emplois permanents annoncés
? Ça c’est un secret défense chez Kalsaka mining. Il avait été dit que
le département de Kalsaka, d'une superficie de 600 kilomètres carrés et
d'une population de plus de 48 700 habitants répartie entre 51
villages, bénéficiera. En outre, il ressort qu’au niveau du
développement local, Kalsaka mining SA mettra à la disposition des
populations de Kalsaka, des infrastructures socio-économiques (écoles,
dispensaires, micro-crédits, centre de loisirs...) Pour ce faire, un
comité communautaire consultatif est à pied d’œuvre en vue d’évaluer
les actions à réaliser. Les populations attendent toujours, un an après
le début des travaux. Le reste se contente de « bouffer » la poussière
au quotidien et à subir les affres des dynamites et autres
ronronnements des gros engins. Et les affres ne s’arrêtent pas là. Pour
certains anciens, la mine est responsable de l’état actuel de leurs
habitats. « Nos maisons sont fissurées, et nos enfants souffrent de
toux liée à la poussière que dégagent les travaux… », affirment-ils.
L’occasion faisant le larron, les populations veulent profiter de ce «
quiproquo » pour rappeler à Kalsaka mining SA, ses responsabilités. «
Dans d’autres localités on construit des écoles, des centres de santé
pour les populations. Ici, depuis un an que la mine est fonctionnelle,
rien. Même pas une brique n’a été posée. Et non content de cela, ils
brisent nos espoirs en profanant nos fétiches », clame Issaka. Mieux,
le ministre en charge des Mines avait exhorté la société Cluff mining à
prendre toutes les dispositions diligentes pour mener les activités
d’exploitation de la mine selon les règles de l’art. Avec le sacrilège
qui a été commis, qui est loin d’être dans les règles de l’art comme
recommandé par le ministre, Kalsaka mining S.A a plus qu’un devoir
celui de tenir tous les engagements pris qui sont ceux d’être à leurs
côtés, de les soutenir pour un mieux-être. Sinon, pour l’heure, l’or ne
brille donc pas pour tout le monde comme le souhaite l’ONG ORCADE de
Moses KAMBOU dont le combat est de renforcer les capacités des
populations pour le développement. Comment Kalsaka pourra se développer
si ses fils et filles ne s’unissent pas pour défendre ses intérêts ?.o
Frédéric ILBOUDO
Mode africaine
De plus en plus, la mode africaine prend des galons. Stylistes et créateurs rivalisent d’ardeur pour donner à la mode africaine ses lettres de noblesse à travers : défilés, festivals, rencontres, salons, etc. Du 13 au 18 juillet 2008 ils étaient nombreux les stylistes et les créateurs à se donner rendez-vous à Yaoundé au Cameroun. Objectif, faire briller la mode africaine. Deux stylistes burkinabè étaient de la fête. BASEM’SE et IDE MAVA ont représenté dignement le pays des Hommes intègres.
Un “rêve d’enfant” tratuit dans la réalité avec ces somptueuses robes de soirée et de mariée qui ont fait sensation à Yaoundé |
Quand plus d’une quinzaine de stylistes venant de plusieurs pays d’Afrique, d’Europe et d’Amérique se retrouvent pour exalter la mode, il faut être sûr qu’il y avait de belles choses à voir, et surtout, des coupes et des couleurs «d’enfer». C’est dans cet univers plein de splendeur, de lumière, où se frotte beauté féminine, dans un décor féerique que BAZEM’SE et IDE MAVA sont partis faire valoir la mode burkinabè. A l’hôtel HILTON se tenait l’évènement, troisième du genre «First Class fashion Saloom». Il s’agissait de ce grand rendez-vous du donner et du recevoir organisé par SONOMOB afin de mettre en valeur les grands noms de la mode africaine, et leur travail, et ce pour la troisième fois le Burkina a ébloui par les œuvres de ses représentants. A Yaoundé, le BAZEM’SE national a présenté «rêve d’enfant» le nom de sa collection. «Rêve d’enfant est un travail qui a été basé sur le woodin et le raphia qui me sont parvenus d’ailleurs depuis le Cameroun. C’était ma façon à moi aussi de rendre hommage à ce pays qui nous accueillait. C’était aussi une façon pour moi de montrer mon savoir-faire avec cette matière qui n’est pas de chez moi», a soutenu l’artiste BAZEM’SE que nous avons rencontré à son retour de cette aventure. Quant à IDE MAVA, il s’est fait le fervent promoteur de notre Faso dan fani. Outre les défilés qui permettaient aux stylistes de mettre en exergue leurs talents, des ateliers de réflexion ont permis aux participants de se pencher non seulement sur l’avenir de la mode africaine, mais plus encore, sur l’avenir du styliste tout court. Le salon aura permis aux stylistes de découvrir et de se frotter à d’autres matières qu’ils ne connaissaient pas. Une fois de plus le porte-étendard de la mode burkinabè qu’est BAZEM’SE a montré que notre pays a son mot à dire dans l’univers de la mode africaine et mondiale de façon générale. La sortie du Cameroun pour les deux stylistes a porté des fruits puisque, à travers leurs prestations, ils ont convaincu. Ce qui leur a valu d’autres invitations et d’autres projets de rencontres au Cameroun et dans d’autres pays, tout cela dans l’objectif de valoriser la mode burkinabè.
Par Frédéric ILBOUDO
Ballys Spinto artiste musicien ivoirien/ « Georges Ouédraogo a été connu en Afrique avant moi »
« Georges Ouédraogo a été connu en Afrique avant moi »
Présent à Ouagadougou dans le cadre de la célébration des 40 de musique de son ami et frère Georges OUEDRAOGO le Gandaogo national, Bailly Spinto monument de la musique africaine s’est prêté à nos questions. Avec une carrière d’artiste bien remplie (16 albums) à son actif ce précurseur de la musique africaine revient dans cette interview sur ses relations avec Georges OUEDRAOGO, le Burkina Faso. Dans cet entretien, il donne également son point de vu sur la musique d’aujourd’hui et sur la crise que son pays a traversé. Lisez plutôt.
Actuellement je suis en pleine préparation de disque, mon seizième album, dont la sortie est prévue pour fin Avril. Mon staff est actuellement en train de préparer la sortie de l’œuvre. C’est un album qui va être quelque chose de formidable, parce que sur l’album il y a eu des featuring avec Henry DUBOULA, on a repris ANOUMEY qui est l’un de mes tubes en zouk love. On a repris une chanson d’un kenyan qui a chanté MALAÏKA, la chanson qui a révélé Miriam MAKEBA, et dans cet album également j’y ai mis de grands slows comme l’africain les aime. Je suis donc en pleine sortie d’album, en plus de ça j’ai de grands chantiers dans la ville et au village, des activités qui m’occupent énormément. Je suis quelqu’un de très pris et si je suis venu au BF, c’est que ce pays fait parti de mon patrimoine à moi en tant que chanteur. Toute ma jeunesse et ce jusqu’aujourd’hui des burkinabè se sont ouverts à moi, et je peut vous le dire cela remonte au année 66. Mon premier concert ici avec les « fétiches » à la maison du peuple et jusqu’aujourd’hui le Burkina m’a toujours ouvert ses portes. A chaque évènement important je suis toujours là. J’ai un calendrier très chargé, mais dès qu’on me parle du Burkina, c’est comme si c’était une piqûre que l’on me met, je ne peux pas résisté, je prends l’avion et je viens.
Comment est née votre amitié avec Georges OUEDRAODO ?
Moi je n’ai pas connu Georges Ouédraogo en tant que chanteur. Moi j’étais le chanteur du groupe unie système dans lequel G. O a joué. Et dans ce groupe, il y avait Rato Venance avec lequel G.O a joué au BOZAMBO, il y avait KASSABY DEY un autre musicien, nous étions au total six musiciens. G O jouait dans un groupe en CI qu’on appelle, les freemans si ma mémoire est bonne. Les freemans jouaient dans une grandes boite de renom qu’on appelait le KIRIRUM. G O a été débauché dans ce groupe par Mady SANFO. Mady SANFO qui était un jeune burkinabè, paix à son âme, qui a créé un groupe en CI qu’on appelait le New système Pop et c’est M S qui a amené G O au NSP. Moi je suis arrivé au NSP venant aussi d’un autre groupe. Et c’est au NSP que l’on s’est rencontré. G.O et moi avons occupé la même chambre. On était six artistes et il y avait six chambres, mais on nous a mis deux, pour avoir la place pour le matériel et pour pouvoir faire les répétitions. Il y avait donc deux lits dans chaque chambre et les choses ont voulu que lui et moi on se retrouve dans la même chambre, et c’est comme ça que j’ai pratiqué G O. Quelqu’un d’extraordinaire, quelqu’un qui était fier de ce qu’il est. Fier d’être mossi. Et chaque fois qu’il faisait quelque chose d’extraordinaire, il disait : « moi petit mossi là ». S’il fait un bon roulement de batterie ou bien il pose un acte qui est sublime, il viens devant nous et il dire « moi petit mossi là ! » C’est après que j’ai compris que c’était en fait lui sa façon de se galvaniser. G O est quelqu’un aimait la musique et la percussion et il était très serviable. Comme il voulait chanter, il m’observait beaucoup, tous mes gestes il observait, alors qu’il était à la batterie, et en plus on dormait dans la même chambre. Ce qui m’a frappé, quant il partait pour l’Allemagne, il était obligé de fuir la nuit à minuit. Son départ pour l’Allemagne allait créer un vide puisse qu’il allait casser un groupe pour créer un autre groupe. Il partait donc sans le consentement de des responsables du groupe, donc il fallait fuir, et c’est comme ça que Georges est parti. Six mois après le départ de G O nous aussi on a eu notre chance parce que le groupe était remodelé et on s’est retrouvé et on a fait près de 10 ans de tournée à travers le monde. On s’est retrouvé même au Mexique.
Qu’est ce que ça vous fait aujourd’hui d’accompagner un ami artiste qui fête ses quarante ans de carrière ?
Je dis que c’est important et je suis d’accord qu’il fête ses quarante ans, parce que G O faisait un peu mur dans le groupe dans lequel on était. G O était un BCBG (Bon chic Bon genre) c’était quelqu’un qui aimait bien s’habillé. Il faut dire aussi que c’est quelqu’un qui a commencé sa carrière très jeune.
Comment vous appréciez sa musique ?
Quant on a commencé à composer nos chansons dans nos langues, il accompagné ces chansons à la batterie, et intérieurement, le projet que M Jimmy Hyacinthe avait pour eux, c’était de revaloriser le patrimoine musical du terroir, chacun à son niveau. C’était énorme, c’était inestimable. A l’époque, des jeunes gens qui laissent tomber tous ce qui est musique de variété, et qui créent eux même leur propre style, dans leur langue et tous ça, c’était extraordinaire. G .O a eu la chance de percer avant nous autres, avant moi qui était pourtant son chanteur leader dans les groupes de jeunes. Il a percé avant moi, il a été connu en Afrique avant moi, et il a fallu que moi aussi je cravache dure venir. Tout chose qui n’ pas été du tout facile parce que arrivé en Europe chacun se cherchait, chacun était aller se chercher comme on dit, et moi-même qui était le leed vocal il a été très difficile pour moi d’avoir un producteur. G O a eu la chance d’avoir avec lui Jimmy Hyacinthe en Allemagne, où ils ont eu à faire du bon boulot, puis après comme dans les chansons de BOZAMBO il y avait une originalité, qui se dégageait et qui était les chansons de G O, cela a fait qu’il a émergé parmi tous les autres musiciens qui étaient avec lui.
Personnellement si vous regardez un peu en arrière qu’est ce que vous voyez ?
Ce que je vois, je vois que les artistes de notre génération, il faut que les gens les laissent tranquille, que les gens les laissent qu’ils puissent proposer une musique à leur dimension, une musique soft, cool, et qu’on est pas a regardé dans le rétroviseur parce que nous sommes des avants gardistes, nous avons créer, nous avons proposer des choses à l’Afrique. Aujourd’hui, il y a n’en beaucoup de notre génération qui ne sont plus, paix à leurs âmes, ils sont partis, et nous qui sommes resté, il faut que les africains nous encadrent pour qu’on puisse être à côté de ses jeunes là. Ne ce reste que pour leur montrer le chemin, comment il faut y arriver, leur montrer le chemin à parcourir pour y arriver. Aujourd’hui tout est un peu facile. Moi je ne regarde pas dans le rétroviseur.
Comment appréhendez vous la musique d’aujourd’hui par rapport a votre temps ?
La musique aujourd’hui je l’accepte, étant une musique urbaine, et je suis d’accord avec le phénomène, et j’encourage d’ailleurs ces jeunes parce que c’est leur époque, c’est leur temps, et on ne peut pas les en vouloir de faire ce qu’ils font. Ils ont un public qui les suit, c’est tout a fait normal. Mais je dis que c’est à nous de l’ancienne génération de rester dans notre créneau à nous, nous avons aussi notre public, et notre public est un public select parce que ce sont des gens qui ont assez de moyens et nous aussi nous sommes fiers d’avoir fait des choses pour nos pays, pour notre continent de par le passé et nous aussi nous restons dans notre position, dans notre style, dans notre feeling, sans regardé derrière par rapport aux jeunes qui sont là. Les jeunes qui sont là aussi font leur travail, et je suis convaincu que eux aussi ils seront dépassés par rapport à une autre époque à d’autres jeunes qui vont arrivés plus tard. Moi personnellement je respecte ce que les jeunes ont apporté dans la musique africaine.
Votre pays
Moi j’ai très mal vécu la crise ivoirienne. Je l’ai mal vécu parce que moi j’ai des parents burkinabè et certaines choses qui se passaient dans ce pays me faisaient mal. Ma petite sœur même père même mère, qui était marié à feu Tiga OUEDRAOGO votre fameux chroniqueur sportif, est revenu au Burkina avec ma petite sœur qui est elle aussi aujourd’hui décédée. Ils ont laissé un enfant et la fille qu’ils ont laissé, elle est chez moi aujourd’hui et elle va se marier bientôt. C’est vous dire que tout ce qui se passait en C I, j’étais gêné, j’étais frustré parce que le Burkina et
Frédéric ILBOUDO