L'amour au bout d'une carte
La saint valentin est fêtée avec ferveur en milieu scolaire. A chaque veille de la fête des amoureux, chacun rivalise d'ardeur pour épater l'élu de son cœur. Outre les invitations le jour J et les autres petits cadeaux qui sont offerts, les cartes de vœux occupent une place importante sur la liste de présent de nos élèves Un tour à la « carterie 2001 » nous a permis de nous en rendre compte. En l'espace d'une journée, la petite carterie située à deux cent mètres du lycée Marien Gouabi a vu passer des élèves de presque tous les lycées de la ville.
Demain, 14 février, c'est la saint valentin. Mercredi 13 février, 7h 25 du matin veille de la fête des amoureux. Avenue de la BCEAO, porte 83 à Ouagadougou. La « carterie2001 » n'est pas encore ouverte. Pourtant, ils sont nombreux lycéens et lycéennes (reconnaissable à leur tenue scolaire) à se bousculer devant l'entrée. Il faut faire plaisir à son amoureux, à son amoureuse. Les yeux sont étincelants. La joie est perceptible sur les visages. Visiblement, chacun tient à émerveiller, à être émerveiller. A chaque cinq, dix mns on jette les yeux sur la montre. « Je ne comprend pas… » Lance Caroline Ouédraogo élève en classe de 1ère G1 au lycée Gal-yam « …d'habitude il est matinal. Je comptais acheter une carte et rattraper mon cours de sténo pour 8h mais je vois que ça sera pas possible ». Grégoire Nikièma élève de 3ème au lycée Marien N'gouabi. Lui, n'arrive pas a cacher son impatience. Plus de quatre fois, en moins de trente minutes, il aura tapé la porte de boutique de carte. « Peut être qu'il est entrain de dormir à l'intérieur on en sait rien. » a-t-il clamer lorsque tous les regards se fusent vers lui. Tous comme Caroline, et Grégoire ils sont nombreux à s'être absentés volontairement, les premiers cours de ce mercredi matin veille de la fête des amoureux. Il est 8h. La carterie est toujours fermée. Un groupe de jeunes filles du collège de la Lavigerie, ne pouvant plus tenir le coup démarrent leurs engins en trompe et partent. Caroline et sa copine Alima se concertent. « Je crois que c'est mieux que toi tu partes à Burkina pas cher pour l'achat des fleurs au cas où ici ça ne marche pas. Moi je reste et dès que c'est ouvert, je te fais signe » a dit Alima à sa copine. « Non rétorque Caroline toi, il faut y aller parce que tu t'y connaîs mieux en fleur que moi ». Sans hésité un instant, elle démarre. Pendant que certains, las d'attendre s'en vont, d'autres arrivent. Pour détendre l'atmosphère qui était plus que pesant, Achille Kaboré camarade de classe de Grégoire lance à l'endroit de l'absent, « Il ne sais pas que les mots d'amour portés sur 'une carte vaut mieux que dix poulets ou quoi ? ». 8h 30. Enfin, arrive Marcel, le propriétaire de la carterie. Du coup, les visages s'instillent de nouveau. La bousculade commence. Avant même que Marcel n'accède à sa porte, déjà deux rangs se sont formés. Les uns et les autres se livrent alors à de petites confidences. Histoire de savoir quel genre de poème, ou de message chacun va porter sur sa carte. Quel cadeau en plus de la carte sera donné. Ceux qui sont de la même classe, ou dans le même établissement scolaire, s'épient pour ne pas que le penchant soit sur la même personne. La petite boutique d'à peine 3m2 carré de Marcel, comme à chaque 13 février, refuse du monde. Des mains se jettent sur la même carte. De vives discussions s'en suivent. Le maître des lieu intervient. A peine a-t-il éteint la friction ici, que deux jeunes garçons s'empoignent les colles pour les mêmes raisons. « Ne vous en faites pas il y a en pour tous le monde et pour toutes les bourses. Vous voyez tous ces cartons, c'est plein de cartes. Vous ne pourrez pas épuiser mon stock. Pas cette année en tous cas ». Clame Marcel. Ce qui du coup a tempéré les ardeurs. L'affluence, jusqu'au environ de 13h est toujours à son comble. De temps en temps, Marcel ouvre sa caisse, regarde les billets de banque qui s'entassent et esquisse un sourire au coin de la bouche. Il sait qu'aujourd'hui c'est son jour. 18 h 30. Les plus discrets se pointent pour prendre ce qui reste comme carte. Visiblement, nombre de lycéens et lycéennes de la capitale ont opté. Porter l'expression de leur amour au bout de ces cartes.
Frédéric ILBOUDO