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Sophie Renaud, Directrice d’Afrique en Création de CultureFrance/ « J’en appelle à une OPA féminine pour reconquérir les plateaux de danse »

Sophie Renaud, Directrice d’Afrique en Création de CultureFrance
« J’en appelle à une OPA féminine pour reconquérir les plateaux de danse »

A la fin de 8 jours d’intenses communions dans l’univers de la sueur, des mouvements bref dans les méandres de la danse et de la chorégraphie, nous avons rencontré la Directrice d’Afrique en Création de CultureFrance. Objectif, faire le bilan des 7èmes rencontres de «Danse l’Afrique danse»

Quel bilan tirez vous des 7ème Rencontres chorégraphiques « Danse l’Afrique danse » et êtes vous satisfaite en tant que directrice?
Une nouvelle fois on peut constaté que la danse en Afrique est bien vivante et surtout, non seulement qu’elle est vivante, mais, il y a de plus en plus de relève, de plus en plus de jeunes danseurs qui s’attaquent à la chorégraphie et qui ont des propositions qui, même si elles ne sont pas toujours abouties, font preuve de pas mal d’idées et de maîtrise de pas mal d’éléments. On peut se dire que sur le plan artistique global, il y a eu des choses moins fortes que ce qu’on a pu voir certaines années. Je crois que cela est dû au fait qu’on a à faire à une génération intermédiaire, des graines qui poussent, Je crois qu’on est en train de constater le démarrage des jeunes chorégraphes. Je suis satisfaite du déroulement du festival. Ma seule déception est liée à l’absence de femmes sur les plateaux. Je trouve cela redoutable et ça m’inquiète parce que ça n’était pas le cas les années précédentes. La danse en Afrique s’est masculinisée énormément, et je me pose des questions. Je me pose des questions et je pense qu’en Afrique, e statut d’artiste est plus reconnu et plus valorisé qu’en Europe. Non pas qu’il y a des statuts juridiques on sais bien qu’il n’y a pas de protection, mais dans la société, un artiste qui vie de son art et qui commence à avoir une vie à l’international, très vite c’est quelqu’un qui gagne sa vie mieux que beaucoup de gens dans cette même société. Je crois que cela permet d’acquérir un certain pouvoir et du coup ce pouvoir a été récupéré par les hommes comme malheureusement c’est le cas. J’en appelle à une OPA féminine pour reconquérir les plateaux de danse.

L’innovation cette année c’était les solos, qu’est ce qui a prévalu à l’intégration de solo au niveau du concours?
Je crois que l’intégration des solos c’est justement ça, c’est le constat que sur les pièces de groupe, on le sais c’est beaucoup plus compliqué d’aboutir sur une écriture de pièce aussi claire que cela, et je me rend bien compte que depuis deux ans de plus en plus de chorégraphes sont très jeunes, et ce n’est pas forcement une bonne idée de forcer de jeunes chorégraphes à écrire pour des groupes. Beaucoup ont des choses à dire en solo et déjà l’exercice de style est important. L’initiative des solos permet de donner l’opportunité à de jeunes chorégraphes et aux artistes de ne pas se confronter à des formes trop difficiles. Par ailleurs c’est vrai que pour des questions de moyens et d’économie, partout le solo est une forme qui est de plus en plus développé, et on a avait un certains nombre qu’on tentait de présenter en hors concours et qui portant était des formes proposées par des artistes qu’on connaissait pas. Nous nous sommes dit qu’il n’y avait pas de raison que ce ne soit pas une section du concours

Pourquoi alors se limité à un seul prix dans cette catégorie ?
On peut toujours donner 15 prix ou même donner un prix à tout le monde. Mais ce n’est pas l’objet. Je pense qu’il faut faire attention aux prix, pour que les artistes travaillent pour le mériter. Il faut que les artistes comprennent qu’on n’arrive pas tout de suite avec un prix, il faut un peu de temps. L’idée c’est de les encourager à travailler, mais je pense que de toute façon, pour tous les participants, de cette rencontre, concours ou pas concours, en dehors des prix et des tournées qui sont organisées pour les lauréats, tous les participants ont eu l’opportunité d’être vu par le public tunisien et il a été nombreux et remarquable comme on a pu le voir, mais surtout par tous les professionnels. Ils étaient plus de 200 a avoir fait le déplacement, programmateurs, journalistes, etc., eux quant ils regardent les œuvres ils se foutent de savoir si c’est du concours ou pas du concours. Ils viennent ici faire leur marché même si le terme ici n’est pas approprié. Je crois que beaucoup d’entre eux ont trouvé de belles choses en dehors du concours.

Paris 2006, Tunis 2008, Bamako 2010, comment se fait le choix du pays organisateur ?
C’est une histoire de conjoncture, de personne, de dynamisme. La Tunisie, je l’ai expliqué, on avait constater depuis quelques années que sur le continent que le festival de danse contemporaine de Carthage, qui est l’un des plus ancien est portée à bout de bras par Syhem Belkhodja. Elle a démarré quelque temps après Aboki Ngoma, de Elise MBala, un petit peu avant Bamako danse de Kettly Noël, ainsi que Salia nï Seydou etc. C’était important me semblait-il de pouvoir lui donner une place et ça permettait également d’intégrer la Tunisie et partant le Maghreb dans cette dynamique et finalement de faire ce pont qui n’est pas suffisamment fait entre la partie maghrébine et la partie subsaharienne du continent africain. L’un des grands succès de ce festival, l’une de ces forces, c’est la réussite sur la participation du public. Ce festival est un témoignage que l’on peut avoir la capacité de faire dans les pays africains. La manière dont on peut éduquer un public je crois que c’est extrêmement important avec des manière qui ne sont pas du tout occidental et nous voulions aussi que les professionnels voient ça. J’en veux pour preuve la manière dont, jour après jour Syhem Belkhodja s’adresse au public, lui donne des indication, l’incite à faire partie de la fête, cela est très spécifique et nous trouvons cela très extraordinaire. L’étape de Bamako, elle est, regardons un peu les paysages ou trouvons nous les festivals qui sont nés et ont grandis ces dernières années ? Il y a en un certain nombre parmi les gens qui sont installés sur le continent. Il y a Elise M’balla à Yaoundé, Kettly Noël à Bamako, il y a Salia nï Seydou à Ouagadougou avec « Dialogue de corps » et qui aurait pu être une étape avec la « Termitière », et puis il ne faut pas oublier que Salia a été directeur artistique il y a peu de temps, et c’est bien de marquer un temps une étape avec ça. Nous pensons qu’avec Kettly à Bamako avec ce qu’il fait nous pensons qu’elle pourra donner quelque chose à voir. Ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est qu’une manifestation de cette envergure, demande beaucoup notamment, en terme d’infrastructures. Parce que au bas mot il y a trois cent soixante dix personnes artistes et professionnels à loger, il faut aussi des infrastructures en terme de théâtres. A Bamako, à l’occasion des rencontres africaine de la photographie, nous avons pu inaugurer un nouveau lieu, qu’on a réussi à pérenniser avec le centre culturel français et d’autres partenaires. Et c’est un lieu sur lequel on pourra essayer de développer quelque chose avec le public.

Quel regard portez vous de façon générale sur l’évolution de la danse contemporaine sur le continent. Parce que c’est cas même CultureFrance votre organisation qui reste le premier partenaire du secteur ?
Oui c’est vrai, et je crois que ça le restera, tant que nous avons les moyens que nous avons aujourd’hui avec le programme Afrique en Création. Ce sont des moyens qui ne sont jamais sécurisés et pour lesquels chaque année, il faut se battre pour avoir. Et nous allons commencer à entamer la bataille du prochain financement trisannuel d’ici quelques mois. Et j’ai bien conscience de l’importance que ça à puisque tout ce qui a été construit pendant des années est bien et que si quelque chose devait de notre côté lâchée cela fera basculer sans doute beaucoup de chose dans l’édifice. Je me sens une responsabilité importante, par rapport à ça, mais je pense que si les choses se poursuivent comme c’est le cas aujourd’hui, on va réussir à travers des manifestations comme celle-ci, avec la prise en charge de celle-ci de la manière de la confier et de la confier dans un réel esprit de partage avec des opérateurs je pense qu’on peut réussir à convaincre les politiques en Afrique de la nécessité d’investir dans la danse. Je crois qu’aujourd’hui, et c’est ce que je fais à la direction de ce programme, j’ai une autre conception de la coopération culturelle pendant un certain nombre d’année, je dirai relevant d’une autre époque. Cette volonté véritable de partage, je pense qu’elle peut contribuer à ouvrir l’esprit des politiques qui eux aussi ont envi d’un autres rapport avec le France.

Pourtant si Culturefrance se retire aujourd’hui pour une raison ou pour une autre la danse contemporaine africaine tombe. Etes vous de cet avis ?
Non je ne crois pas que la danse tombera. La danse elle est vivante et les artistes n’arrêteront pas de créer. Les passerelles qui ont été créés aujourd’hui, je pense que ce sont des passerelles qui, si elles sont exploitées par les artistes peuvent permettre de les maintenir vivant. Cela va continuer à faire vivre la danse et va permettre le retour d’autres partenaires et je reste convaincue qu’elle ne va pas disparaître. Par contre, ça va fragiliser les manifestations. Ça fragilisera les festivals, je pense que ça ne sera pas tant les artistes et les compagnies, pour tous ceux en tous cas qui ont des assises, il n’y aura pas de problème. Mais pour les artistes émergeants, il sera beaucoup plus difficile d’émerger sans nous je dirais. Ce qui est important dans ce genre de rencontre, c’est que c’est un espace qui nourri les danseurs a cause des expériences venus des autres pays du continent et au-delà. Ces rencontres entre des danseurs de Madagascar et du Sénégal, du Burkina Faso et d’Afrique du sud, ce mélange est très important pour la rechercher artistique. Il est vital de maintenir ce contact pour garder vivant cette différence qu’il y a entre les danseurs qu’ils viennent d’Afrique, d’Europe, etc.

Par Frédéric ILBOUDO



23/05/2008
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