Destruction du fétiche de Kalsaka « La destruction d’un site culturel est un crime… »
Destruction du fétiche de Kalsaka
« La destruction d’un site culturel est un crime… »
Dixit Maître Titinga Frédéric PACERE éminent homme de culture, de droit et de lettres
C’est un grand homme de lettres, de droit…, mais aussi et surtout de culture. Sa détermination, son engagement dans la défense, la promotion et la valorisation de la culture burkinabè, en particulier et celle africaine en général, fait de lui une référence sur le continent et au-delà. Qui mieux que lui pouvait éclairer les Burkinabè sur la destruction de fétiche de la commune rurale de Kalsaka, qui défraie la chronique, et dont nous avons traitée dans notre édition n°628. Nous l’avons rencontré pour mieux comprendre pour vous, tout ce qui entoure les fétiches et leurs mystères en pays mossi. Lisons plutôt !
Maître, en tant qu’homme de culture de ce pays, qu’est-ce qu’un « Teng-kugri » ou fétiche en milieu mossi ?
Me T F P : Un
Teng-kugri est composé de « Teng » qui signifie terre et « Kugri » qui
signifie pierre. Le Teng-kugri c’est dans la coutume des mossé, une
pierre de fondation d’une terre, c’est-à-dire d’un commandement. Son
sens s’est élargi, a recouvert des domaines un peu variés mais tous
liés à l’esprit d’emplacement de l’origine d’un commandement. Comme son
nom l’indique, c’est souvent un simple « Tambr-seongo » qui est la
simple pierre désagrégée qu’on utilise de nos jours justement pour les
fondations d’immeubles avec des d’agrégats (ciment,…) pour créer la
solidité appelée de nos jours cailloux sauvages. De tels lieux où sont
implantés le Teng-kugri, sont souvent appelés simplement, « Tenga » qui
signifie terre. C’est évidemment un lieu sacré, puisqu’il est
l’emplacement et la marque au sens réel de l’origine du commandement.
Il est sacré : à preuve, pour des grands rites de saison, on y immole
des moutons, des poulets voir des bœufs. Il est précisé que
généralement, le concept de teng-kugri concerne les Nakomsé,
conquérants, fondateurs d’empires et de circonscriptions
administratives politiques. Il ne concerne pas en général les
Younyonsé, bien que cela puisse exister dans leur zone, s’il s’agit
d’un village exclusivement de Younyonsé. Si une femme a des difficultés
pour enfanter, on peut s’adresser à cet endroit-là, qui signifie qu’il
est sacré. On l’implore pour avoir un enfant. Si la maternité
intervient, l’enfant portera, par exemple, le nom de Tenga (Terre) s’il
s’agit d’un garçon, Tengpoko, « Terre femme » ou fille de la « Terre ».
Ou Tendaogo « homme de la Terre. Terre ici n’est pas la terre au sens
courant mais le lieu sacré, qu’est le Teng-kugri.
Mais dites, Maître, un village peut-il avoir plusieurs fétiches ou Teng-kuga ? (pluriel de Teng-kugri)
Me T F P :
Le problème doit-être envisagé sous plusieurs angles. Au sens
étymologique, une circonscription administrative (royaume, canton,
village, quartier) ne peut en ce qui le concerne, avoir deux Teng-kuga.
Parce qu’il s’agit, par le Teng-kugri, de la représentation physique,
matériel, culturel de l’origine de la circonscription administrative.
Cependant, au point de vu espace géographique, il se peut que sur un
même plateau terrien, il y ait plusieurs Teng-kuga. S’il s’agit d’un
canton, par exemple, le canton au niveau de la gestion de l’autorité,
se trouve symbolisé en un endroit, au même lieu par exemple que le
village qui abrite le palais du chef. Il est donc possible qu’en ce
même lieu, peut-être espacé de quelque centaine des mètres, il y ait le
Teng-kugri du canton, celui du village, et même le Teng-kugri du
quartier. De nos jours, il y a une sorte de globalisation des termes.
Je prends le cas de mon village, Manéga pour compréhension. Il y a un
seul Teng-kugri portant ici le nom de Tenga comme je l’ai déjà précisé
à quelque cinquante mètre de la maison du chef. Mais sur le plateau
central de Manéga (un rayon de cinq cent mètres), il est implanté
treize lieux sacrés de la vie et de la protection du village. Chaque
lieu porte un nom, pas forcément faisant référence à sa fonction, mais
un nom qui le distingue des autres. Pour les anciens du village et pour
les villageois, chaque lieu sacré est appelé spécifiquement par son nom
et est connu d’eux. Mais sous l’angle du sacré, de nos jours l’ensemble
des lieux sacrés pour simplification pour le langage courant, est
désigné par les «Teng- kuga» de Manéga. Au pluriel ici, utilisé un peu
partout dans le Moogho, le terme Teng-kuga désigne dès lors l’ensemble
des lieux sacrés des circonscriptions administratives et coutumières.
Néanmoins, pour qu’un lieu reçoive cette appellation il importe qu’au
centre de ce lieu, il y ait des pierres (cailloux sauvages tel que
spécifié) pour matérialiser le cœur de ce sanctuaire et pour recevoir
les rituels des sacrifices de saison. Ainsi, à Manéga, il y a le
Teng-kugri « Teens-kaoongo » en traduction littérale, bosquet des
fétiches, ou bosquet des rites cultuels. Comme le nom de ce lieu
l’indique, c’est un bosquet en quelque sorte une petite forêt sacrée,
son bois est interdit à la cuisine ou pour quoi que ce soit, d’où sa
préservation jusqu’à nos jours. Il est pratiquement dans l’aire
actuelle du Musée de Manéga. Personne ne doit couper un morceau de bois
d’arbres ou même des pailles de ce sanctuaire. En son centre et depuis
le 12ème siècle il y a des cailloux qui matérialisent physiquement le
lieu sacré et le lieu des rites. Ce lieu, est appelé plutôt par son nom
que par la désignation de Teng-kugri. Il y a même un boa en ce bosquet
qui sort de temps à autre et qui m’effraye moi-même, et déjà aperçu par
des touristes du Musée. Il est interdit de le toucher. J’ai également
interdit de le toucher du fait que pratiquement, j’ai la garde morale
de ce lieu, qui, comme je le dis, est dans l’aire du musée.
Qu’est-ce qu’un Teng-kugri peut représenter pour un royaume, un canton, un village, un quartier, une famille, un individu ?
Me T F P :
Le Teng-kugri porte sur une circonscription administrative coutumière.
C’est peut-être d’un royaume, d’un canton, d’un village, d’un quartier.
Il est également le centre de la circonscription administrative, pas au
sens géométrique ; mais au sens de l’existence de la création du point
d’ancrage et de cette circonscription administrative. A priori, une
famille ou un individu n’a de Teng-kugri. Pour les familles, dans
certaines régions, il y a un lieu sacré dans la cour, qui marque le
lieu central au sens coutumier de l’implantation de la maison
familiale. On l’appelle « Siman-Tenga ». Il n’est pas souvent
matérialisé, du fait qu’il est dans la cour. Mais, on connaît son
emplacement au jour du rituel de saison d’adresse aux ancêtres, tel que
le « Basga » (au niveau du plateau central) ou « Filga » qui se
pratique dans la région du Nord. On le reconnaît parce que le chef de
famille doit toujours se mémorer ce lieu parce que c’est là qu’il doit
immoler les poulets, au jour annuel de la fête de saison. Il n’est pas
forcément à côté de la case du chef de famille. Celui qui est à côté de
la porte de la case du chef de famille, porte le nom de « Sigré ». Le
Teng-kugri est donc un sanctuaire d’installation et de marque physique,
réelle, d’une circonscription administrative.
Quelles sont les conséquences pour les populations de la localité si ce Teng-kugri est détruit par inadvertance ?
Me T F P : On
ne peut pas détruire un teng-kugri par inadvertance. Parce que le lieu
est reconnu de tout le monde. Un étranger n’a pas à aller fouler le
lieu de ses pieds. Souvent même, aucun sentier ne conduit directement à
un Teng-kugri. Un sentier dans un village peut passer à 5, 10, 20
mètres, mais aucun sentier ne conduit à un Teng-kugri. Les rituels pour
le Teng-kugri ne sont jamais fréquents. Souvent une fois, deux fois
trois, fois par an, à moins de nécessité extrême. Du fait qu’on n’y va
pas, que le lieu n’est pas fréquenté, les sentiers ne conduisent pas à
un teng-kugri. On ne peut pas aller à ce lieu par inadvertance.
Quant à la destruction du Teng-kugri, on comprend, puisque c’est
l’origine de la création matérielle de la circonscription. Création qui
passe forcément le 1er jour par des invocations aux ancêtres, des
adresses de sollicitations de bonheur et de paix aux ancêtres. C’est
dire donc que la destruction d’un Teng-kugri signifie, la destruction
morale de la circonscription administrative par violation des liens de
respect que les vivants du jour ont envers Dieu, les ancêtres, les
devanciers. C’est pour cela que la destruction d’un Teng-kugri, est
plus qu’un sacrilège. La destruction d’un site culturel est un crime.
Elle suppose une rupture volontaire qu’une tierce personne opère, pour
rupture des liens entre les vivants et les morts. La coutume évidemment
est pour le milieu, la destruction de la vie de la personne qui a
détruit le Teng-kugri ou, dans le milieu accepter, acquiescer, une
rupture définitive qu’on impose à la localité envers ceux qui ont créé
cette localité et leurs descendances.
Et si c’est intentionnel, est-ce les mêmes conséquences ?
Me T F P : Comme je l’ai dis, le problème de l’intention ici, est
complexe. Parce que s’agissant du Teng-kugri, et pour le milieu
culturel du fait qu’aucun sentier souvent ne conduit à ces lieux, la
profanation est toujours volontaire. C’est dire que pour le milieu et
pour certaines localités notamment les Tansoaba ou (gens de guerre),
qui ont des armes, l’expression du « Burkina » (homme intègre), « Kuum
saon yandé », (la mort vaut mieux que l’humiliation). Seule donc la
mort de l’auteur peut réparer si elle peut réparer, l’humiliation.
Dans le cas de Kalsaka, on a retrouvé les restes des fétiches. Ces restes ont-ils les mêmes pouvoirs que l’authentique ?
Me T F P :
Je viens de rentrer au pays. J’avoue que l’opportunité, ne m’a pas
encore conduit à Kalsaka pour que je connaisse ces coutumes
particulières, donc son Teng-kugri, même si évidemment celui, qui
relève des principes généraux du sacré. Le Teng-kugri, comme je l’ai
dis, c’est souvent de grosses pierres désagrégées implanter dans le
sol. On n’a pas à les déplacer, parce qu’elles sont liées à un
emplacement géographique. Leurs puissances cultuelles relèvent de leur
présence au lieu de leur implantation.
Un Teng-kugri d’une
circonscription administrative ne répond plus des origines réelles
d’implantations de cette circonscription administrative. Le Teng-kugri
n’a de sens, de valeur que rester dans son lieu d’origine
d’implantation, parce qu’il signifie le lieu d’emplacement ou de
référence d’origine du village.
Je signale qu’en raison de certaines diasporas, une communauté qui se
déplace et qui arrive en un certain lieu peut faire d’une colline, son
Teng-kugri. Cela peut répondre d’un dicton pour un groupe qui estime
n’avoir pas eu un pouvoir qui leur revenait selon eux, et qui ont pris
la fuite pour être arrêté dans leur marche par une colline. Le dicton
dit «Koom san zoé ta tanga a taa tèka» (l’eau qui a atteint la
montagne, a atteint son terminus).Ce point d’arrêt que marque la
colline peut-être appelée le teng-kugri de cette circonscription
administrative. Ce sont des particularités de région sinon, le
teng-kugri est comme je l’ai dit, la pierre ou les pierres prisent pour
poser qui marquent l’origine de la circonscription administrative,
coutumière. J’ai dis que je ne connais pas le Teng-kugri de Kalsaka
mais de ce que j’ai pu entendre et lire dans la presse, il semble qu’il
s’agit d’un rocher, la matière évidemment est complexe parce que pour
certaines zones, un tel Teng-kugri est le rocher. Dans sa
configuration, dans sa réalité matérielle, dans son esthétique il doit
rester tel. Je m’en remets à la décision ou à l’analyse que pourraient
avoir, les anciens de ce village.
Mais pour certains villages, des morceaux quelque peu éparpillés,
ramenés. Mais il en faut l’intégralité, qui doivent passer par des
interrogatoires auprès des ancêtres pour comportements à avoir. Les
temps ne sont plus les mêmes et les comportements des hommes et les
nécessités de la vie modernes peuvent ne pas correspondre à la
nécessaire connaissance naturelle des autochtones en regard de leur
sacré. Sous cet angle, les mossé disent que « l’étranger ne connaît pas
les trous ». Mais cela signifie aussi que ne connaissant pas les trous
et voulant bien marcher dans le village, l’étranger se doit de se
renseigner. Cela est un signe de respect et de considération pour
lui-même et pour les autres. La stabilité générale, la paix, a concerné
le village et l’étranger passe par cette prudence de la part de
l’étranger, de tout faire pour connaître l’autre et éviter des
désagréments pour l’autre et lui-même. Ainsi dans notre temps actuel,
pour de telles situations, la coutume peut être claire et sans
équivoque. Je regretterai personnellement si la destruction a pu être
opérée à l’insu des autorités coutumières parce que le malaise devient
certain et la solution difficile. A moins qu’il y ait de la tolérance
des hommes.
Y a-t-il possibilité de réparer un tel préjudice ? Et comment ?
Me T F P :
Il est difficile dans mon entendement, de réparer un tel préjudice
surtout si le site cultuel a connu des désagréments. La seule
réparation possible, c’est de remettre la situation en l’état. Comment,
j’avoue que je ne le sais pas. Il importe surtout dans mon entendement,
qu’on garde et préserve en l’état, ce genre de lieu de culte avec leurs
compositions physiques.
Si le mal est déjà fait, je crois que le
problème ne peut se poser que dans l’histoire et les habitudes du
milieu. C’est dire qu’il faut s’en remettre à l’autorité coutumière du
milieu entourée de son conseil, pour des recherches de solutions si
solution existe.
Y a-t-il déjà eu un ou des précédents du genre dans notre pays, et dont vous avez connaissance ?
Me T F P :
Je le regrette beaucoup pour notre pays, de nombreux les lieux sacrés
de Teng-kuga ont été détruits par la colonisation et souvent hélas
parachever par notre vie actuelle des lotissements. Prenant le cas de
Ouagadougou, le lieu sacré de culte appelé « Zom-toeega » était dans la
zone complètement dénudée aujourd’hui, de l’ancien camp fonctionnaire
de Ouagadougou : entre l’aire de la paroisse cathédrale et la mairie
centrale. En cette zone également était un site des plus importants de
la capitale, la tombe du Moogho Naaba ZOMBRE qui recevait des rites
séculaires. Et pour cause, c’est le Moogho Naaba ZOMBRE qui a fait de
OUAGDOG (Ouagadougou), la capitale définitive du Moogho, qui deviendra
la capitale du Burkina Faso. La tombe et le lieu sacrés ont été rasés.
Le lieu sacré « Teens-kaongo » était situé côté Nord-est de l’actuelle
Avenue du Moogho Naaba Wobgo (ancienne avenue Bassawarga), ce lieu
sacré et son Teng-kugri en particulier, recevait les couples stériles
en quête d’enfants). Les sites sacrés détruits à Ouagadougou sont
nombreux et c’est dommage. Il y a même, des lieux sacrés de rites
millénaires à Ouagadougou et ailleurs qui ont été expropriés par l’Etat
pour cause d’utilité publique. A ma modeste échelle, je le déplore
beaucoup parce que plusieurs de ces lieux ne sont pas seulement des
centres d’expressions religieux, mais peuvent comporter des valeurs et
des enseignements qui connu, auraient contribué, à la construction de
nos peuples. Je vous cite un exemple.
J’ai préservé à cette fin, en
truisant tous les lieux sacré de Manéga afin que le lotissement
n’intervienne, des monuments, pour physiquement les matérialisés à
interdire pratiquement à moins d’inconscience, leur destruction. Sur le
plateau central de Manéga, il y a le teng-kugri appelé «Kinkir-gogo»,
essentiellement institué pour la chasse. C’est dans ce lieu qu’est
construit le rituel de «Kinkir-gogo», c’est dans ce lieu, qu’il y a des
animaux de toute nature et un monument que j’ai construit. Le rituel du
Kinkir-gogo est annuel. Au jour du rituel, toute la population du
village est conviée en ce lieu, les anciens procèdent à leur rite et
immole un poulet, qui ne sera pas consommé. Il sera grillé, séché et
accroché à une branche d’arbre. Toute la population est conviée dès
lors, à aller dans la brousse et tuer les animaux sauvages. Les animaux
qui seront tués ne seront pas consommés immédiatement, mais, seront
frits et conservés. Pendant une semaine, la population va en brousse et
revient avec ce qu’elle a pu tuer comme animaux sauvages. Au dernier
jour, tous les chefs de famille sont conviés à amener des céréales, des
ingrédients de cuisine, tout ce qui a été rassemblé de viandes sauvages
est préparé et mangé ensemble par toute la collectivité.
Seulement, en dehors de cette semaine, qui a vu tuer autant d’animaux
sauvages que possible, il était interdit à la population de tuer les
animaux sauvages. Il y avait dans la population, sur une superficie qui
atteignait coutumièrement 20 sur 30km, pas plus de cinq chasseurs
coutumiers. Ils ne pouvaient évidemment pas détruire au cours de
l’année abusivement, les animaux sauvages qui continuaient à pulluler
dans la région.
A réfléchir et à analyser, avec notre vision moderne des sociétés, ce
Teng-kugri, sanctuaire Kinkir-gogo par son existence, son rite, ses
prescriptions signifient que l’homme des traditions a vu que sa vie
imposait un équilibre avec la nature. On ne pouvait pas tuer n’importe
comment des animaux sauvages. De même, il y a dans la région, un
sanctuaire où il est interdit la coupe abusive du bois. Pour ces
milieux, l’arbre est une vie qui doit être respectée. La coupe abusive
du bois est contraire à nos traditions. A l’enfance, j’ai même assisté
à un rituel d’un masque partie d’un Teng-kugri, qu’il anime et avec son
fouet il devait frapper le tronc de tous les arbres fruitiers de la
région, pour en autoriser la consommation parce que les fruits sont
mûrs de l’appréciation du Teng-kugri, dont relève ce masque. De nos
jours, les enfants tombent malades, parce qu’ils ont mangé des karités
ou des raisons sauvages verts. Si ces garde-fous de rites de Teng-kuga
même organisés autrement pour notre temps existaient de nos jours ou
pouvaient recevoir application des principes de nos jours, l’homme
pourrait vivre dans un milieu plus équilibré, plus sain, pour plus
cordialité de fraternité et d’unité. C’est pour cela qu’il faut éviter
le vandalisme actuel, la chasse inconsidérée aux sorcières que nous
connaissons de notre temps contre les valeurs ancestrales, qui,
n’emportent pas uniquement et exclusivement des éléments du religieux.
Encore que cela mérite respect, mais aussi des éléments de protection
et de construction de la vie sociale à être connu et à être exporté par
nos gouvernances modernes.
Une compensation financière est-elle possible et envisageable ?
Me T F P : A
mon sens, une compensation financière est non seulement inopportune,
non seulement interdite, mais surtout elle est injurieuse.
Il
faut savoir que l’argent, en tant qu’argent, et même en tant que cauris
de l’ancien temps, n’entrent de ma connaissance, dans aucun rituel
sacré. On a utilisé l’argent dans le cadre civil par exemple à entrer
dans la composition de la dote. Mais là-aussi, à ne relever que du pur
symbole. A titre d’illustration du civil, jusqu’aujourd’hui à Manéga et
depuis un certain temps (l’existence de la monnaie moderne) il est
réglementé que la base de la somme monétaire, est le chiffre 100, (100
franc en mooré soit 500FCFA). Le chiffre coutumier symbolisant l’homme,
est le chiffre 3, et celui, symbolisant la femme le 4. Dans la
composition de la dote, la somme à offrir au père de la jeune fille est
de 130 franc mooré (500F CFA plus 150F CFA) pour la mère, la somme à
lui remettre est 140 franc mooré (soit 500F CFA plus 200F CFA). C’est
dire que l’argent n’a pas un rôle financier important dans la gestion
de la coutume. Même, si on est milliardaire, on ne peut dépasser ce
montant.
Ramener à la destruction d’un lieu sacré, il appartient aux autorités
coutumières pour gérer le problème avec les devanciers, les ancêtres,
et de proposer la compensation, qui s’impose si une solution existe.
Mais à mon sens, il faut éviter de mettre l’argent dedans. Je suis
conscient, surtout de nos jours, que justement, des institutions
financières, des sociétés commerciales peuvent jouer sur l’exploitation
de la terre matérielle de laquelle en particulier, peuvent emporter
l’existence d’un sanctuaire souvent millénaire.
En dehors de la superficie matérielle, culturelle du sanctuaire à ne
pas être mise en cause dans toute tractation et de réparation qui
m’apparaîtrait indécente et anti-coutumière, il serait de justice que
les populations attenantes à ce sanctuaire, dont la vie rituelle et
sociale relève de ce sanctuaire, partagent les mérites, les attributs,
les potentialités de toute nature d’une terre, qui est la leur et celle
de leurs ancêtres. Et tout exploitant n’a pas le droit d’agir ici en
terrain conquis.
Mais qu’au moins au triple niveau administratif, judiciaire ou politique des solutions peuvent être trouvées ?
Me T F P : Je crois au fond, pour ma part que ce problème, n’a pas à être élevé au niveau judiciaire.
Avant la justice, il y a d’autres comportements à observer qui
éviteraient des dérapages dans les milieux concernés, d’où la
nécessaire implication de l’autorité administrative et de l’Etat. Sur
le site d’exploitation concerné, il m’apparaît indiqué que des enquêtes
préalables soient faites auprès notamment des responsables coutumiers
de la localité. Des dispositions ici, donc préalables devraient être
prises pour éviter des incompréhensions avec les occupants coutumiers
des zones, même si par principe l’Etat serait le propriétaire et donc
gestionnaire exclusif de ces périmètres. Les désordres sociaux doivent
être prévenus, anticipés quant à la connaissance et éviter en cas de
comportements regrettables ultérieurs sur le site par quelque personne
physique ou morale que ce soit. A mon sens, au besoin, les dispositions
de forme d’exploitation peuvent être envisagées même par des travaux
souterrains pour préserver certains sites névralgiques. Par ailleurs,
qu’il s’agisse de sociétés nationales, ou en internationales, la
courtoisie des règles coutumières des localités doivent être
respectées. Il serait souhaitable que si une zone sensible était
relevée dans un milieu coutumier, que le problème soit directement
élevé auprès de l’autorité administrative immédiate et des autorités de
tutelles en cas de nécessité pour une gestion de l’ensemble, quelque
peu à trois, l’Etat, l’organisme d’exploitation de la mine et
l’autorité coutumière, celle-ci, a droits à des exposés à l’autorité
administrative et à être défendus. Les milieux traditionnels, il faut
l’accepter, ne peuvent pas par eux-mêmes maîtriser les méandres des
conventions et leurs incidences. Dès lors leurs droits coutumiers
risquant d’être atteint selon eux par une tierce personne, il vaut
mieux que leurs droits allégués soient d’abord intégralement exposés
auprès de l’autorité administrative immédiate pour gestion avec eux.
Ces droits s’ils sont grave atteints peuvent avoir échappé à l’autorité
administrative suprême, qui a signé la convention. En raison, de cas de
force majeure survenue à la mise en application d’une convention,
l’Etat peut réexaminer la situation pour éviter un dérapage et qu’une
situation ne porte atteinte à la paix sociale. Mais, si l’autorité
coutumière entre directement en négociation avec la personne, physique
ou morale bénéficiaire des droits d’exploitations, alors que cette
autorité coutumière n’est pas nantie des bagages essentiels de défense
de ses droits, elle peut poser des bases qui pourront contrarier
ultérieurement la stratégie de défense des droits coutumiers. Des
solutions peuvent intervenir, mais il faut que les bases, ne soient pas
déjà faussées. Le terrain est complexe et glissant et il faudrait de la
prudence pour tout le monde. Je pense à l’institution, qui a bénéficié
des droits d’exploitations et le milieu coutumier, dont relève le site
d’exploitation. Pour ces genres d’incompréhension, il vaut mieux
toujours prévenir que guérir, parce que si l’on ne prévient pas par des
mesures préalables, on peut déboucher sur des situations qu’on ne peut
pas gérer. Nous déplorons à travers le continent des populations
toujours en guerre contre les sociétés d’exploitations, parce que les
bases légitimes des droits des uns et des autres, à tord ou à raison
ont été méconnus. Comme je l’ai dis, ne serait-ce que pour les milieux
coutumiers que je connais, des ententes préalables peuvent toujours
intervenir à condition que l’on respecte les populations autochtones et
que l’on n’agisse pas en terrain conquis même muni d’un parchemin..o
Frédéric ILBOUDO
A découvrir aussi
- Talent de Femme Soirée de femmes
- Sébastien Baziemo dit «Bazem’se» styliste, couturier, et concepteur de «Folie de Mode act1» «La société n’est rien sans la mode »
- Kalsaka Mining L’or, le fétiche et la discorde
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 1627 autres membres